Steve est éditorialiste au Los Angeles Times. Séparé de sa femme, éditrice en chef du journal, il traverse une crise qui interroge son métier, son divorce, et à laquelle le journal, qui perd ses lecteurs, est aussi confronté. Cependant, Steve continue de s'attacher aux sujets de ses articles, et est spontanément attiré par un musicien qui joue sur deux cordes d'un violon en piteux état sous une statue de Beethoven. Le sans-abri connaît la musique, tient des propos décousus mais d'une indéniable poésie, et a passé deux années dans la prestigieuse université de Julliard. Steve s'attache à Nathaniel, comme sujet d'étude d'abord, et comme ami ensuite.
Steve Lopez a réellement existé et a tiré un livre de son aventure. Le réalisateur, Joe Wright, s'est permis des libertés par rapport au récit, comme de faire de son personnage un homme divorcé, mais a conservé cette incroyable relation entre deux hommes, l'un sain mais qui voit son monde dans une impasse, l'autre schizophrène et qui voit la beauté de son univers, et réussit à trouver la quiétude dans la musique. Joe Wright réussit à faire s'interroger son héros, et donc le spectateur, sur l'influence des individus les uns sur les autres. Peut-on, et doit-on forcer quelqu'un a rentrer dans une certaine norme, lorsque celui-ci ne semble pas le demander? Steve tente de sortir Nathaniel de la misère, mais se pose des questions sur la mission qu'il s'est assigné. Peut-être Nathaniel réussit-il à être heureux dans son monde imaginaire, et peut-être Steve, dans son désir de le confronter à la réalité, est-il poussé par la volonté de soulager sa conscience par une bonne action, plus que par une pure amitié. Bien entendu, la bonne morale conclue le film, et il se trouve que c'est Steve qui trouve le plus la tranquillité au contact de Nathaniel qui le contraire. La conclusion du film a beau être profondément honnête, cela n'enlève rien à sa force, et à l'extraordinaire histoire qui le tient.
Dans la forme, la réalisation est nettement plus osée que le scénario. Joe Wright filme une ville aux autoroutes tortueuses et aux recoins laids, peuplées de paumés, extraordinairement embellie par la photographie, comme observée du point de vue de Nathaniel. On plonge parfois sans transition dans un Los Angeles d'un autre âge, bruni, par les flahs-backs du jeune Nathaniel confronté à sa schizophrénie dès son enfance, dans une sombre cave qui lui tient lieu de chambre. La musique, évidemment omniprésente, et classique, permet au réalisateur d'entreprendre de grandes envolées lyriques, presque kitch si elles n'étaient pas si hardies, jusqu'à une ou deux minutes de flashs lumineux et colorés dans un écran totalement noir. Certains diront que c'est de la poésie et de l'audace, d'autres y verront une écœurante mise en scène soulignée par des orchestres trop virtuoses.
Pour ma part, j'y ai vu une grande sensibilité, et un quotidien des sans-abri montré sans fard, comme une Cour des Miracles moderne, avec même une petite ouverture vers l'ironie - à la suite de la générosité du maire... Sans non plus être un film extraordinaire, il possède la juste dose d'impertinence et de lyrisme pour transporter le spectateur.
Le soliste
de Joe Wright
avec Rovert Downey Jr., Jamie Foxx, Catherine Keener,...
sortie française: 23 décembre 2009