Friday, January 29, 2010

A serious man, de Joel & Ethan Coen

Larry Gopnik, professeur de physique, est juif et malchanceux. Toute la poisse du monde s'abat sur lui. Et pourtant, il tente d'être un homme bien, allant chercher conseil auprès de rabbins qui sauraient réorienter sa vie.


Ce qui va mal dans la vie de Larry, ce sont les autres: sa femme le quitte, pour un certain Sy condescendant; son fils fume et en oublie ses études et sa bar-mitzvah;  sa fille tente d'avoir une vie sociale; son frère dort dans son canapé sans chercher de travail. Par-dessus le marché, des lettres anonymes dont le directeur de l'université lui fait part semblent compromettre sa titularisation, et un étudiant chinois tente de le corrompre pour ne pas perdre sa bourse. C'est un déluge de malheurs sur lesquels Larry n'a que peu de contrôle, mais, tentant de réconforter tout le monde, il en oublie de gérer les problèmes qui lui retombent sur le coin de la figure. Le ton aurait pu être tragique, le contexte sombre; mais on rit des problèmes de Larry. Sans s'en moquer non plus, mais l'avalanche de problèmes vire au grotesque et le diablotin qui s'acharne sur ce seul petit homme amuse follement le spectateur.


Du diable il est question, et du bon dieu aussi. Les frères Coen découpent leur film pour ouvrir trois chapitres différents, au cours desquels Larry s'approche peu à peu du rabbin le plus vieux, le plus sage aussi, en commençant par le plus juvénile, hilarant Simon Helberg, qui a décidément la tête de l'emploi. Le film regorge de jargon juif, parfois incompréhensible, mais dont la définition n'est pas indispensable pour saisir le comique de la situation. Ce n'est certainement un film sur la religion, mais celle-ci est présente et donne un éclat particulier à toutes les décisions de Larry, prises dans les meilleures intentions d'être un homme de foi et de bonté. Quelque dieu se soucie peu cependant des efforts désespérés de notre personnage, et, pas plus que les rabbins rencontrés, ne vient le secourir. Le sort ou le ciel continue à faire pleuvoir la mauvaise fortune, à la plus grande joie du spectateur.


J'ai beau adorer Fargo, The Big Lebowski ou No country for old men, tous les films des frères Coen ne m'emballent pas systématiquement, et leur humour peut parfois ne pas me toucher (Ladykillers, O'Brother, Burn afer reading...). Mais A serious man est réellement hilarant, et joue à merveille sur les clichés et la caricature, et reste raffiné malgré cela. Ce dernier opus est donc d'excellente facture. N'oublions pas de noter également le soin porté à l'affiche, excellente accroche graphique, et présentant ce personnage, banal, voire "pauvre type" avec ses pantalons taille haute, ses chemises rentrées et ses lunettes de professeur d'école... tel un Woody Allen dans ses meilleures années, au moins!


A serious man
de Joel & Ethan Coen
avec Michael Stuhlbarg, Sari Lennick, Richard Kind,...
sortie française: 20 janvier 2010

Sunday, January 24, 2010

Mr Nobody, de Jaco Van Dormael

Nemo Nobody fête son anniversaire. Il a 119 ans et est le dernier homme sur Terre dont les cellules n'ont jamais été régénérées; il sera le dernier à mourir de vieillesse. Avant cela, son médecin tente de percer ses souvenirs; Nemo Nobody a disparu des registres à l'âge de 34 ans. Le médecin, et un journaliste, qui s'insinue dans l'hôpital, à la recherche d'un exceptionnel scoop, lui font remonter le temps et raconter ses souvenirs. Mais la mémoire de Nemo Nobody est pleine de vies différentes, en fonction des choix qu'il aurait pu faire à des moments clés de sa vie. Les histoires qu'il raconte, entremêlent divers âges et divers choix de vie...


Les principaux choix de Nemo tournent autour de l'amour. D'abord celui porté à ses parents, qui lui demandent à leur divorce de choisir entre eux deux, et ensuite celui porté à trois petites filles, auprès desquelles il s'imagine grandir, se marier, vivre et vieillir. L'idée sur les différents choix qui s'offrent à nous pourrait être intéressante. Mais le réalisateur et son approche uniquement romantique du sujet gâchent la pertinence du film. Les choix de vie de Nemo ne se concentrent que sur les différentes femmes qu'il épouse, tandis que tout le reste est toujours plus ou moins semblable. Les seules alternatives de Nemo concernent-elles uniquement sa sexualité? C'est réduire nos choix de vie à bien peu de choses, que de les concentrer seulement sur nos affections. Même si celles-ci jouent un rôle majeur dans les options que l'on croise sur nos chemins, d'autres facteurs entrent certainement en jeu.


Le sujet oscille entre une philosophie mal définie et une absurdité qui aurait pu être plaisante s'il elle avait été poussée jusqu'à la limite de l'incompréhensible. Mais le réalisateur refuse de se laisser emporter, et malgré l'entrecroisement de différentes alternatives d'une seule vie, reste extrêmement didactique. Les voix off viennent expliquer avec une logique implacable toutes les décisions prises par l'enfant, l'adulte, et le vieillard qu'est Nemo. Pas assez de fantaisie donc, et même les scènes qui s'ancrent dans une vision hallucinatoire d'un monde pré-natal manquent de légèreté. Et, malgré l'infinité de choix qui semblent s'offrir à chaque existence, Nemo, dans toutes ses vies, revient toujours vers Anna, comme si un certain destin intervenait pour recentrer ses options sur une seule ligne, droite.


Le montage appuie le côté linéaire et très scolaire du film. Un an a été nécessaire pour terminer la post-production, et le réalisateur a tenu a faire assister ses deux monteurs principaux d'une équipe de "juniors" chargés de proposer d'autres assemblages de séquences, dans le but d'observer le maximum de possibilités. Le film, monté ainsi, ne réussit pas à soumettre le spectateur aux méandres de l'esprit de Nemo. Au contraire, il manque d'originalité, se servant à outrance des retours auprès de Nemo à 119 ans, répondant aux questions du médecin ou du journaliste qui fouillent son esprit. Les relances de ces deux personnages très secondaires sont une facilité primitive pour passer d'un mariage de Nemo à l'autre.


L'image du futur n'est elle pas du tout soulignée, et c'est à peine qu'on prête attention aux cochons devenus animaux de compagnie ou aux écrans géants qui ornent les métros. C'est une énorme déception que ce Mr. Nobody qui pêche par sa rigueur et par trop de sang-froid.


Mr. Nobody
de Jaco Van Dormeal
avec Jared Leto, Sarah Polley, Diane Kruger,...
sortie française: 13 janvier 2009



Conseil de lecture: l'excellent L'homme-dé (The Dice man), de Luke Rhinehart, l'histoire d'un psychiatre new-yorkais qui décide de régir sa vie par le hasard, refuse de faire des choix et laisse son existence se jouer sur des coups de dé.

Friday, January 22, 2010

César 2010 - Les nommés

Les nommés sont... pour les César 2010. La cérémonie aura lieu le 27 février prochain et sera présidée par Valérie Lemercier et Gad Elmaleh. J'espère que Un Prophète raflera la mise; La journée de la jupe, Rapt, Les herbes folles et Le dernier pour la route sont des films également mémorables - et donc, récompensables. Côté étranger, oui au Ruban blanc!


Monday, January 18, 2010

Invictus, de Clint Eastwood

Clint Eastwood a montré avec Gran Torino son intérêt pour la lutte anti-raciale. Il place le thème au centre de son dernier film, prenant comme support et contexte l'Afrique du Sud dans les années 90. Nelson Mandela a fait l'Histoire lors de sa présidence, réussissant le tour de force de réconcilier Noirs et Blancs, Africains et Afrikaners, dans un pays alors dominé par l'apartheid. L'une des ficelles qu'il tire pour y arriver, et dont Clint Eastwood joue, a été d'user de l'émotion populaire engendrée par le sport. La coupe du monde du rugby, en 1995, est organisée par l'Afrique du Sud. Le film se concentre sur l'engouement de Mandela pour l'équipe des Springbocks et sur son calcul politique par rapport à l'image des joueurs. Il se sert de l'évènement sportif pour prouver que Blancs et Noirs peuvent cohabiter en paix, et construire une nation.


Clint Eastwood concentre absolument tout son propos autour de la pacification, sans quasiment évoquer les autres priorités du président Mandela. Son objectif est clair: il veut montrer un monde de paix, où serait effacée tout idée de race. Dès lors que cet objectif est défini, il ne s'en détourne jamais, et chaque scène le répète encore et encore. La fin de l'apartheid concerne évidemment un pays tout entier, mais Eastwood a l'intelligence de concentrer son attention sur un  petite groupe de gardes du corps évoluant autour de Mandela pour simplifier le jeu de relation entre Blancs et Noirs. Le petit univers composé par ses fidèles, Noirs, auquel Mandela adjoint les gardes du corps du Président précédent, Blancs, est une représentation en miniature de ce qui se déroule au sein de toute la nation. Au départ méfiants et en colère contre ces collègues, anciens opprimants, les hommes de Mandela font contre mauvaise fortune bon cœur. Ils sont au premier plan pour montrer au monde, devant les caméras, qu'ils peuvent travailler, et sympathiser avec leurs anciens persécuteurs. Ils sont aussi les premiers influencés par la passion naissante de Mandela pour le rugby, et toute l'équipe de gardes du corps se soude alors avec l'espoir d'une victoire en coupe du monde.


Le rugby est, bien entendu, l'autre grand présent du film. Si le réalisateur utilise l'entourage de Mandela pour expliquer l'opinion des Noirs, il expose les ressentiments des Afrikaners autour de l'équipe des Springbocks, presque exclusivement composée de joueurs blancs. Le capitaine de l'équipe, interprété par Matt Damon, est entouré d'une famille aux idées ouvertement racistes. L'équipe qu'il mène est soutenue par les Blancs du pays. Ses joueurs ont également du mal à accepter le nouveau Président et son implication dans leur sport. Le personnage de François Pienaar est le premier à comprendre et à changer au sein de ce cercle. Il devient auprès de son équipe le messager des idées de Mandela.


Évidemment, cette équipe démarre sans soutien, enchaînant les défaites, soutenue par la minorité blanche, huée par la majorité noire. Au fur et à mesure que leur envie de représenter leur pays grandit, les victoires se font toujours plus grandioses. Grandiloquent, Eastwood se sert de ces clichés simplissimes pour faire passer son message et les accompagne d'une réalisation d'un classicisme qui lui est propre. Chaque plan est au service d'une seule et même idée, celle de montrer l'opposition entre deux peuples, puis l'évolution de cette relation qui finira par confondre Noirs et Blancs au centre des cadres. L'image est légèrement embrumée par la poussière et la chaleur de l'Afrique du Sud. La caméra suit toujours un mouvement avec harmonie pour évoluer vers un nouveau personnage, ou une autre scène. Un bémol cependant: les premier matchs filmés sont brèves, intenses, et réussissent à montrer la sueur et les chocs du terrain, la ferveur des gradins; mais les deux dernières rencontres, les plus importantes, sont trop longues, et redondantes. Un effet de slow motion vient perturber le rythme , par une durée démesurée, et les perturbations de son qu'il engendre. Mais l'émotion resurgit sur la conclusion d'Eastwood, qui termine son film sur les mots de Mandela, militants, et optimistes.


Le génie et la rigueur du réalisateur servent une idée pacifiste d'un manichéisme exemplaire. Le cinéma se devrait d'être toujours ainsi, merveilleusement efficace et porteur de messages universels, autant que le cinéma de Clint Eastwood.


Invictus
de Clint Eastwood
avec Morgan Freeman, Matt Damon, Bonnie Mbuli,...
sortie française: 13 janvier 2010

Friday, January 15, 2010

Bright star, de Jane Campion

Fanny est une couturière hors pair. Elle coud tous ses vêtements, sous le regard admiratif de sa petite soeur et celui, moqueur, du propriétaire de la demeure dans laquelle sa mère, pour loger ses trois enfants, loue une aile. Le bailleur est un poète, du nom de Brown, qui passe ses journées à tenter d'écrire, avec son meilleur ami également poète, John Keats. Fanny est fasciné par le jeune homme et, effrontément, tente chaque jour une approche. John Keats, écrivain sans succès, sans revenu et sans rente, entretient avec elle un amour platonique, sachant que jamais il ne pourra subvenir à ses besoins dans un mariage. Leur attachement est réprouvé par Brown, qui voit en Fanny une jeune écervelée, et par la mère de la jeune fille, qui doute de l'avenir de sa progéniture. Mais Fanny et Keats s'attachent, la première apprenant la littérature, le second lui écrivant des missives toujours plus inspirées. La maladie du jeune homme, et sa mort, précipitent leur amour dans un impossible dénouement.


Le poète romantique anglais a été peu apprécié des critiques de son vivant; lui-même n'avait alors que peu d'estime pour son œuvre, reconnue à titre posthume, après sa mort à vingt-cinq ans. L'amour entre Keats et Fanny est teinté de cette amertume. Keats continue à écrire, malgré les mots acerbes; Fanny devient sa muse, et ne doute pas de son talent. Il est difficile de croire, malgré sa véracité, à cette passion innocente, tant Keats, par le peu de considération qu'il porte à lui-même, semble fade. Cette insignifiance est encore accentuée par sa maladie, qui le montre toujours plus fragile, sans cesse assis derrière ses fenêtres, ou allongé, chaussettes trouées, dans des canapés éliminés. Fanny, à côté de lui, ressemble plus à une mère qu'à une fiancée. Elle apparaît insupportable dans le peu de modestie qu'elle met à parler sans cesse de ses toilettes, indélicate dans ses approches impertinentes et grossières. Sa pauvre culture poétique en fait une femme égoïste, qui ne s'intéresse aux écrits de Keats que comme un moyen d'accéder à lui. La différence qui existe entre elle et Keats donne peu de crédit à leur affection mutuelle.


On peut reconnaître au film une jolie lumière, qui se pose avec délicatesse sur des décors et des costumes recherchés dans leur simplicité campagnarde. Mais les cadres, s'ils sont agréablement composés, restent aussi fixes que des clichés, et l'on s'imagine feuilleter un roman-photo monotone plutôt que de voir un film tout en mouvements. Même lorsque les personnages s'animent, c'est pour se figer, comme dans cette scène ou les deux tourtereaux s'embrassent en marchant paisiblement quelques pas derrière la petite sœur de Fanny; lorsque cette dernière se retourne, comme par jeu, les jeunes gens s'immobilisent en demeurant à une distance louable l'un de l'autre.


Jane Campion n'arrive pas à faire passer l'émotion dans ces jolies images sans grande profondeur, et le scénario qui se déroule, sans réelle dramaturgie, n'est rien de plus qu'une mignonne histoire sans saveur.




Bright star
de Jane Campion
avec Abbie Cornish, Ben Whishaw, Paul Schneider,...
sortie française: 6 janvier 2010

Wednesday, January 13, 2010

Max et les maximonstres, de Spike Jonze

Max se différencie des autres petits garçons par sa grande sensibilité. Son caractère entier l'isole. Sa mère, qui l'élève seule, avec sa grande sœur, s'occupe aussi d'elle, parfois, et Max se sent abandonné. Réagissant, comme à son habitude, à l'extrême, Max fuit, court jusqu'à la forêt, prend une barque et se laisse porter par le courant jusqu'à une île où des monstres attendent celui qui saura prendre la tête de leur petite bande. Max trouve du réconfort et un moyen d'extérioriser ses sentiments dévorants auprès de ces grandes bêtes, débordantes d'affection et imperméables aux coups; il devient roi du clan des monstres.


Spike Jonze a adapté le livre de Maurice Sendak avec brio. L'auteur lui-même approuve cette vision de son œuvre, à la fois toute personnelle, et également proche du Max qu'il a créé. Le livre, comme le film, explorent non pas les simples joies enfantines, mais l'univers de l'enfance, dans les côtés sombres qu'il connaît aussi. Max est confronté aux autres et à ses propres sentiments exubérants, à ses sentiments qu'il n'a pas encore appris à contrôler. Ses jeux, comme ses colères, sont impétueux, et confinent presque à la violence. Le petit garçon est attachant de fragilité inacceptée. Les monstres qu'il s'invente - ou qu'il rencontre vraiment, allez savoir - sont le reflet des personnes qui l'entourent dans la réalité, mais dont la cuirasse, plus épaisse, accepte ses coups, et ses élans d'amour et de guerre.


Le monde dans lequel Max s'enfuit est aussi grand que l'est son enthousiasme. On y côtoie, dans des décors de contes de fées, un désert, une mer déchaînée, une forêt dans laquelle la neige et le soleil sont voisins, où les arbres, immenses, sont troués, où l'herbe tendre, les cailloux et la terre se mêlent. Ces décors à la fois simples et surréalistes par leurs croisements étranges, possèdent une fantaisie accentuée par les constructions des monstres, immenses nids de branches entremêlées, posés comme des œuvres d'art dans des terrains bruts et presque nus.


La seule déception vient de la version doublée. Les monstres ont des voix qui leur correspondent à merveille - Charlotte Gainsbourg ne perd rien de sa gracilité en costume - mais il est dommage de ne trouver des séances qu'en français pour un film qui n'est pas, finalement, destiné aux plus jeunes.


Max et les maximonstres
de Spike Jonze
avec Max Records, Catherine Keener, Charlotte Gainsbourg (VF),...
sortie française: 16 décembre 2009

Tuesday, January 12, 2010

Les chats persans, de Bahman Ghobadi

Téhéran, de nos jours. Negar et Ashkan, jeune couple, ne vit que pour la musique qu'ils composent et interprètent ensemble. Malheureusement, toute musique étant prohibée en Iran, les répétitions sont clandestines, les concerts quasiment impossibles à organiser. Avec l'aide de Nader, ils tentent de réunir, légalement ou pas, les papiers nécessaires pour se rendre à Londres pour un concert. Pour sortir du pays, il faut réunir tout un groupe, aux critères stricts. La caméra suit les deux jeunes gens dans leurs démarches, et propose ainsi de rencontrer à leurs côtés des groupes iraniens, et de se confronter avec eux à l'absurdité de l'administration gouvernementale.


Cette histoire véritable a été scénarisée, mais est filmée comme un documentaire, au cours d'un tournage clandestin. Les personnages interprètent, avec des accents de vérité plus que palpables, leurs propres rôles. L'errance sans fin de Negar et Ashkan dans leur tentative de quitter l'Iran rencontre de nombreux sympathisants. Tous les membres des différents groupes envisagent de partir, pour trouver de meilleures conditions dans lesquelles jouer. Cependant, leur attachement pour leur pays est immense et, malgré toutes les interdictions, chacun projette de chanter les louanges de l'Iran à l'étranger, pour ensuite y revenir et y vivre. Il est étonnant de découvrir cet amour pour un pays qui le leur rend bien mal, refusant la moindre autorisation de concert, obligeant à écrire des textes insipides pour passer au-delà de la censure, et continuer à jouer, et n'hésitant pas à emprisonner la moindre personne qui ferait ne serait-ce qu'une simple répétition.


On pourrait reprocher à la réalisation l'enchaînement de saynètes présentant les différents groupes, tous plutôt stéréotypés. Tous les genres sont représentés, du rock au rap en passant par le métal ou la chanson accompagnée d'une simple guitare acoustique. Chaque rencontre est agrémentée systématiquement d'un titre interprété par le groupe, et illustré à la façon d'un vidéoclip réaliste par des images du quotidien de Téhéran. L'histoire, au final, celle de la quête de Negar et Ashkan, importe peu. On se plaît à découvrir l'immense variété des talents cachés par son gouvernement en Iran, et l'énergie de ces jeunes qui ne souhaitent que diffuser leur musique.


La fin, tragique, offre une morale étrange à ce passionnant documentaire.


Les chats persans
de Bahman Ghobadi
avec Negar Shaghaghi, Ashkan Koshanejad, Hamed Behdad,...
sortie française: 23 décembre 2009

Sunday, January 10, 2010

Avatar, de James Cameron

Jake Sully, ancien marine paralysé des deux jambes, remplace au pied levé son frère, mort alors que son avatar l'attend patiemment. Cet hybride, corps génétiquement modifié pour correspondre à la fois à l'ADN humain et à l'univers des Na'vi, autchotones de Pandora, contrôlé par Jake, a été créé dans le but de s'intégrer parmi la population Na'vi, gagner leur confiance, et réussir l'exploit de les faire déménager... En effet, les terriens souhaitent accéder au terrain, riche en minerais, qui git sous l'arbre géant dans lequel les Na'vi vivent.


Que dire sur Avatar, qui n'ait pas été déjà dit et mille fois répété?  Le scénario est d'un classicisme  efficace mais dont toutes les ficelles sont prévisibles. Jake suit au départ les ordres de ses supérieurs, générés par la force brute; il découvre Pandora chaussé de gros sabots, se moquant des coutumes de ses habitants; au contact des Na'vi, il apprend à admirer leur lien privilégié avec la nature et les éléments, et finit par écouter ses sentiments plutôt que ses directives. Du basique, mais qui fonctionne à la perfection, avec les bons éléments mis en place aux bons moments, et re-surgissant aux moments opportuns.


On finirait par s'ennuyer cependant, au bout de deux heures quarante, si le relief ne réunissait pas les spectateurs devant l'écran. Les personnages des Na'vi sont parfaitement expressifs, l'univers de Pandora est admirable, et encore sublimé par la profondeur de champ qu'offre le relief. James Cameron évite l'écueil de la surenchère - si cela a encore un sens avec les frais qu'Avatar a engendré - et les éléments ne surgissent pas hors de l'écran à tout bout de champ. Simplement, le relief offre une vision nouvelle si proche de la réalité qu'on en oublie presque les énormes lunettes qui nous pèsent sur le visage.


Techniquement étonnant, mais au scénario faiblard, Avatar marquera les mémoires par son coût de production plus que son script. Avant tout, un bon film est une bonne histoire, et la prochaine génération de spectateurs, habituée qu'elle sera au relief, ne fera pas du dernier James Cameron un film culte.


Avatar
de James Cameron
avec Sam Worthington, Zoe Saldana, Sigourney Weaver,...
sortie française: 16 décembre 2009

Monday, January 4, 2010

Le bel âge, de Laurent Perreau

Claire, dix-sept ans, évite soigneusement son grand-père qui a sa tutelle et vit avec elle dans sa grande maison. Elle a laissé tomber les études, se heurte au monde adulte avec un front buté, trouve un peu de réconfort avec la natation et auprès d'un jeune homme rencontré dans un bar. Son grand-père la laisse vivre tout en souffrant de ne pouvoir lui parler. Il vit confronté à ses souvenirs, celui d'une femme qu'il a l'impression d'avoir envoyé à la mort durant la seconde guerre mondiale.


La dichotomie évidente entre ces personnages est soulignée plus encore par la réalisation. La caméra suit Claire à l'épaule, agitée, cadrée de justesse, enveloppée de musique pop; Maurice, le grand-père, écoute des orchestres classiques, et marche au ralenti dans des cadres fixes, au rythme lent des mouvements de caméra. Comme si le fossé évident entre générations ne fonctionnait pas assez de lui-même, le réalisateur tient à souligner de traits grossiers les mondes opposés dans lesquels vivent ses personnages. Cependant, il s'attarde surtout sur celui de Claire, emblème de l'adolescente éternellement tourmentée par ses amours naissantes et par sa franche révolte au monde adulte.


On se demande alors quelle est la véritable histoire que souhaite conter le film. Le scénario ne cesse de varier, accentuant une fois la relation grand-père/petite-fille, puis les différentes "relations" qu'entretient Claire avec ses amis et son petit-ami, ainsi que la période d'apprentissage qu'elle traverse. Le spectateur ne sait sur quel pied danser, ni à quelle histoire se vouer. Il y a Claire, qui évite son grand-père; Claire, qui fuit ses amis, puis revient vers eux comme si elle ne les avait quittés; Claire encore, vivant une histoire d'amour improbable avec un type rencontré au hasard; Claire toujours, qui hésite entre la natation et les études peut-être, quoique son avenir ne soit jamais réellement évoqué. L'adolescence et ses interrogations, ses tergiversations ont déjà été mille fois évoquées, et Laurent Perreau ne tente malheureusement rien de nouveau de ce côté. Claire reste imperméable, incompréhensible dans ses choix faits sur des coups de tête injustifiés.


Le réalisateur ne réussit pas à rendre son propos concis, et s'égare sur les mille chemins que son sujet rend propices. Les pitreries de Michel Piccoli n'en paraissent que plus lamentable, désespérées de donner un peu de légèreté au propos, tandis que Pauline Etienne montre toujours sa figure grave et immature, à la caméra.


Le bel âge
de Laurent Perreau
avec Michel Piccoli, Pauline Etienne, Eric Caravaca,...
sortie française: 30 décembre 2009

Saturday, January 2, 2010

Bilan 2009 cinématographique

Pas du tout dans l'ordre, autre que celui de mes visionnages en 2009, voici mon bilan de l'année passée et les 10 meilleurs films que j'ai pu voir au cinéma. J'ai eu un peu de mal à faire ce bilan, et je n'ai pas eu de vrai coup de coeur comme l'an dernier. J'ose espérer que 2010 offrira de meilleurs plaisirs cinématographiques!



















Friday, January 1, 2010

Gamines, de Eléonore Faucher

Sybille est une femme accomplie, écrivain à succès. Alors qu'elle se rend à une présentation de son livre dans la ville de son enfance, elle se rappelle ses souvenirs, ses sœurs, sa mère qui les a élevées toute seule, son père, absent, qui remplissait leurs pensées. Sybille était le garçon manqué de la famille, blonde parmi les bruns italiens, portrait de son père, blond, et français.


Le montage parallèle montre Sybille, interprétée par Sylvie Testud dont le livre a été adapté, qui marche sans fin, traînant une petite valise, sa fatigue, dans un train et dans une chambre d'hôtel. Les gros plans, les focales très courtes qui emplissent l'écran de flou irréaliste, sa voix lancinante, triste, veulent être les intermédiaires vers son enfance lumineuse quoique difficile. On plonge alors dans la vie de ces enfants pas si sages, qui parlent de leur père à tout bout de champ sans jamais le rencontrer, espionnent leur mère tendrement aimée lorsqu'elle lui parle en chuchotant au téléphone. La famille qui les entourent contraste avec la solitude de Sybille, plus âgée, en route vers sa conférence. Ils sont là, volubiles, bronzés, italiens, des clichés heureux et faciles.


Entre ces deux images, pas de demi-mesure, que des stéréotypes et des banalités, des histoires de petites filles qui défont leur tresse avant d'entrer dans la cour de récréation, qui se battent avec les garçons, et on met tout cela sur le dos d'un père absent. La conclusion du film, elle aussi, est décevante. On se demande bien pourquoi, durant tout le début, Sybille est apparue avec cette figure décomposée, comme si elle se rendait à l'abattoir, alors qu'elle est ravie de retrouver les siens, grandis, vieillis, grisés, et ses sœurs, à l'image de ce qu'elles étaient petites filles. Le père, ce point d'interrogation de toute leur vie, répond enfin présent, mais n'apporte pas la moindre réponse. La morale est banale, les petites filles ont grandi sans lui, et sont devenues heureuses malgré ce manque.


Assez insipide pour résumer, Gamines n'a pas le charme que pouvait présager l'écriture de conte de Sylvie Testud.


Gamines
de Eléonore Faucher
avec Sylvie Testud, Amira Casar, Zoé Duthion
sortie française: 16 décembre 2009