Un jeune homme passe ses vacances en solitaire; sur les bords d'un lac, il rejoint d'autres hommes, et chacun trouve ce qu'il cherche sur la petite plage et dans les bois alentours, de la tranquillité, du sexe, ou bien l'amour. Le jeune homme voit un soir celui qu'il convoite noyer son compagnon de jeu. C'est l'occasion de se rapprocher de l'homme, charismatique, à présent seul lui aussi, tandis que le meurtre est découvert et que l'enquête se rapproche de ce couple nouvellement formé.
C'est d'abord la polémique qui m'a attirée. On va voir L'inconnu du lac par amour du cinéma, mais aussi mu par un esprit de provocation. Le film met ouvertement en scène des amours gays, du sexe gay, du poil, des corps. Est-ce pour choquer? Il y a forcément une arrière pensée jouissive, à mettre en scène une intrigue sur une plage nudiste. Mais c'est aussi un monde à part: la plage est d'abord isolée du monde extérieur, protégée, atypique, et peuplée d'hommes sans fards, sans a prioris. Ce monde a également ses propres règles, celles du sexe, que l'enquêteur aura du mal à comprendre: il lui paraît invraisemblable de coucher avec quelqu'un, sans même retenir un prénom. Est-ce que les lois, ici, sont aussi différentes au point d'accepter le meurtre?
Dans la salle de cinéma, les habitudes changent aussi. On vient plutôt en solitaire voir L'inconnu du lac. Enfermés dans la salle, à quelques sièges les uns des autres, les spectateurs, sans liens entre eux, observent sur l'écran des couples sans pudeur se caresser dans les buissons. Le sexe est cru. Y'a-t-il une gêne dans la salle? J'ai vu certaines séances parfois se vider de leurs spectateurs, l'image leur semblant malsaine. Ca n'a pas été le cas avec L'inconnu du lac. Car au-delà des histoires de nudité, le personnage de Franck, avec sa fragilité et son audace, emmène l'intrigue. Au matin, toujours le même parking, les mêmes voitures, le vent qui souffle. La plage, un peu d'ennui et quelques brasses, Franck trompe sa solitude en rêvant de se réveiller dans les bras d'un autre homme, tous les matins de sa vie le même. Le rêve contraste étrangement avec la réalité, où il vient le réaliser. On croit comme lui cependant au prince charmant.
Et lorsqu'il se présente sous les traits de Michel, grand, fort, beau, regard bleu azur sur sa moustache fière, on suit toujours Franck, fleur bleue témoin du meurtre. Il tente le diable, en s'abandonnant à Michel, pour tester leur amour naissant. Plus il s'approche de la frontière entre l'inconscience et l'audace, moins on regarde l'entrejambe de ces messieurs. L'histoire prend radicalement le dessus, et le spectateur tente de lire dans les yeux des personnages leurs intentions: la folie destructrice de Michel, la passion amoureuse de Franck.
Quand la narration prend à ce point le pas sur une image pourtant captivante dans les moindres détails, on est en présence d'un vrai film de cinéma.
L'inconnu du lac
d'Alain Guiraudie
avec: Pierre Deladonchamps, Christophe Paou, Patrick d'Assumçao,...
sortie française: 12 juin 2013
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