Thursday, January 13, 2011

2001, l'odyssée de l'espace, de Stanley Kubrick - d'Arthur C. Clarke

L'homme n'est encore qu'un animal vivant en troupeau lorsqu'un groupe découvre un monolithe étrange. Au contact de celui-ci, l'humanité naît. Des milliers d'années plus tard, le Dr Heywood Floyd se rend sur la Lune; en compagnie d'autres scientifiques, il est invité à examiner un étrange monolithe découvert enterré dans un cratère lunaire. En 2001, Dave Bowman et Frank Poole, assistés de HAL9000, ordinateur puissant, et de trois autres scientifiques en hibernation, partent à bord de Discovery One vers Jupiter, où un autre monolithe a été découvert.



J'ai donc effectivement vu ce film bien en retard; pour ma défense, je suis née bien après sa sortie en 1968 et j'avais tout de même lu le livre d'Arthur C. Clarke - pas en 1968 bien entendu - pas en 1968 bien entendu, mais après ma naissance quand même. Pour la petite information, que l'on retrouve sur n'importe quel Wikipédia ou site similaire un peu informé, Stanley Kubrick s'est inspiré, pour écrire son script avec Arthur C. Clarke, de deux nouvelles de ce dernier, The Sentinel et Encounter at dawn. Durant le tournage, se basant sur les rushes reçus quotidiennement, puis sur le film dans son entièreté, Arthur C. Clarke a écrit le livre 2001: L'odyssée de l'espace, et quatre tomes à sa suite. Ce travail de collaboration étroite entre un cinéaste et un auteur n'a jamais eu son pareil, à ma connaissance. On dit souvent d'une adaptation cinématographique d'un roman, que le livre est bien mieux. Que peut-on penser de 2001, le film et le livre, alors que l'un et l'autre ont été créés dans le même mouvement?



Et puisqu'on parle tout de même cinéma ici - et qu'on ne fait pas d'analyse amateur des adaptations de romans -, voyons d'abord le film. Stanley Kubrick a réussi à réaliser en 1968 un film qui devrait servir de modèle en 2011 et plus tard encore aux cinéastes, trop rares, qui se frottent à la science-fiction. Si vous ne l'avez pas vu, vous savez sans doute que le film est très long, surtout pour l'époque - aujourd'hui, les films de plus de 2 heures sont monnaie courante; qu'il est marqué par son ambiance musicale classique, par Johann Strauss notamment; et que les plans sont fixes, très fixes, et se fient de la gravité. Stanley Kubrick crée une ambiance planante - ça tombe bien, on est à plus de dix mille pieds au-dessus de la Terre -, tout ça avec une économie de moyens extraordinaires. Le dépouillement est là magistralement utilisé. Le vaisseau se constitue de peu de pièces, l'univers est blanc et les hommes fonctionnent au ralenti, montrant ainsi le peu de divertissement qu'ils ont durant leur voyage, leur maigre utilité par rapport à l'ordinateur, un calme que connaît mieux leurs compagnons de route, qui hibernent sagement dans leurs sarcophages.




Il est incroyable de penser que ce film, réalisé en 1968, sans 3D, sans relief, sans logiciel surpuissant, juste une bonne dose d'imagination pour figurer ce qui ne peut être réalisé - allez tourner dans l'espace, merci l'explosion de budget - et qui raconte le combat de l'homme contre la machine, soit aussi réaliste. Réalisé aujourd'hui, 2001 perdrait probablement tout son crédit en ajoutant des personnages en post-production et des plans d'espace immenses, ainsi qu'un vaisseau digne d'une machine de geeko-tuné. Je l'ai toujours pensé, mieux vaut un bon costume de singe et un décor en carton-pâte qu'un Jar Jar Binks ou deux mille Na'vi - attention, ceci n'est pas valable pour le Dune de David Lynch, mais est parfaitement illustré par la saga Star Wars.


Peut-être futur parfait exemple de ce que je veux illustrer, le cas de Tron: sorti en 1982, le film trouve le moyen, avec un décor vide et trois loupiotes, de simuler un univers entier. Les costumes en latex de Tron: Legacy, qui ne va pas tarder à sortir sur nos écrans, les motos stylisées, et une ville recréée en 3D me font craindre que, même si le scénario est réussi, on perde franchement l'esprit de vide dépouillement du premier opus.


J'aurais quand même, au final, préféré la lecture du livre d'Arthur C. Clarke au film de Stanley Kubrick, mais ça, c'est parce que d'une, j'aime bien passer du temps avec un bon bouquin, et deux, je crois bien que ce genre d'univers futuriste vieillit tout de même à l'image; notre imagination pourra toujours s'actualiser, contrairement à la pellicule. Mais question narration, Stanley Kubrick livre un travail exemplaire. Tout ça pour dire que j'ai enfin vu 2001: l'odyssée de l'espace.



2001: l'odyssée de l'espace
de Stanley Kubrick
avec Keir Dullea, Gary Lockwood, William Sylvester,...
sortie: 1968


2001: l'odyssée de l'espace
d'Arthur C. Clarke

4 comments:

Unknown said...

Merci pour cette oeil neuf sur le film, très intéressant !

Alors la séquence de fin ? c'est généralement une expérience qu'on oublie pas ;)

TheOldCuban

Fanny B. said...

Le film entier ne s'oublie pas! Quant à la fin, j'avais déjà lu et relu le bouquin assez largement, donc j'étais surtout curieuse de voir comment Kubrick allait le mettre en image. Merveilleusement bien, évidemment!

Boavida Carlos said...

Excellent article. Perso j'avais lu le bouquin avant de voir le film (qui m'a tout de même sérieusement estomaqué au 1er visionnage !!!). Et tout comme Fanny, j'ai pris connaissance des deux après 1968 (suis né en 1970, en retard de deux ans...) mais il est vrai que le bouquin (comme toujours) explicite on-ne-peut-mieux l'histoire. D'accord aussi avec le fait qu'une telle synergie auteur/réalisateur risque probablement de ne plus jamais voir le jour, et enfin pour conclure que j'appelle de tous mes voeux un réalisateur méticuleux (un vrai) capable de nous livrer une adaptation de Dune digne de ce nom (c'est pas gagné !!!) avec le même sérieux qu'à l'époque de 2001 l'odyssée de l'espace.

Fanny B. said...

J'adorerai également voir enfin une bonne adaptation de Dune... Cependant, même avec un réalisateur génial, et un producteur qui lui lâche la bride... j'aurai terriblement peur du résultat, des effets spéciaux, du casting... Je crois que, un peu lâchement, je préfère le Dune qui est dans ma tête!