Friday, June 10, 2011

Annecy 2011 - Jour 4

La connection internet étant ce qu'elle est, la publication du message arrive un peu tard, mais sera riche... Trois projections hier, histoire de compenser avec le manque de la veille.

WIP La nuit des corneilles, de Jean-Christophe Dessaint

J'aime généralement les Work in progress pour leur honnêteté vis à vis des productions; des professionnels parlent à d'autres professionnels, ou au moins amateurs très éclairés futurs professionnels, et ne sont pas là pour vendre leur film. On s'intéresse donc au véritable pourquoi du comment de choix artistiques, faits en fonction autant de l'envie d'un réalisateur – artiste – que d'un producteur – financier – et d'un budget et dans une limite de temps. Le jour des corneilles est un film qui a l'air tout à fait adorable: l'envie unie du réalisateur et des co-producteurs, dont l'une est aussi la scénariste du film, de parler aux enfants de sujets graves, dans un univers naturel et avec une animation se rapprochant au mieux du dessin animé traditionnel, est tout à fait louable. Mais cela n'a pas suffit à rendre la séance intéressante. Le projet a effectivement été présenté de manière linéaire, avec une approche annoncée comme scénaristique et sur le travail de l'adaptation du roman de Jean-François Beauchemin, mais n'a en aucun cas réussit à nous faire rentrer dans les arcanes de la production. Certes, on a vu une animatique animée en noir et blanc très poussée, et exclusive. Mais les intervenants se sont contentés de nous raconter l'histoire, et l'édulcoration de ce conte pour adultes, en parsemant leur discours de séquences du film. La question au centre du débat qui n'a pas eu lieu aurait du être « pourquoi adapter un livre pour adultes en histoire pour enfants, plutôt que de ne pas partir d'un conte pour enfants pour conserver le même public, ou garder la noirceur du roman pour tenter de convaincre une audience adulte? » La déception était donc grande, à la hauteur de mon espérance sur ce film qui a vraiment l'air d'être une aventure superbe pour ceux qui y participent, et qui saura séduire son public. Au final, la séance de Work in progress m'a légèrement écœurée de cette histoire qui devient gentillette, simpliste, et perd sa noirceur et sa profondeur.


Masterclass Bill Plympton

Bill Plympton est ce type à part, un animateur hors normes qui réussit à conserver son indépendance en produisant ses propres films, à sa propre vitesse, avec une équipe réduite et un débit personnel tout à fait incroyable. Il adore le festival d'Annecy et s'y rend tous les ans, se rendant disponible pour tous, agréable, heureux d'être là. Sur la scène de la petite salle à Bonlieu, ravi de faire son show, Bill Plympton a animé une séance riche en films, en informations ancrée dans le réel monde du travail de l'animateur. Entre deux dessins griffonnés sur un grand tableau, deux courts-métrages diffusés, Bill Plympton raconte son histoire, sa réussite, ses grands fondamentaux. Il reste fidèle à ses idées, met l'accent sur les histoires qu'il a à raconter plutôt que sur une technique couteuse. Evidemment, avec SA technique d'animation traditionnelle, et sa rapidité d'exécution, nul besoin d'ordinateurs! Pour lui, un film doit être fait rapidement, simplement, efficacement, et coûter le moins d'argent possible pour en rapporter plus, et continuer le process une nouvelle fois. Bon, l'homme est aussi incroyable, productif au niveau des idées, et des dessins. Son rythme ne saurait être tenu par tous. Il présentait également en exclusivité les premières images de son film, une animatique animée. Généreux, drôle, intéressant, Bill Plympton a vraiment présenté une des conférences les plus passionnantes du festival.


Courts-métrages en sélection n°4

C'est une excellente sélection que regroupe cette séance, mis à part le dernier court-métrage, qui ne respecte par ailleurs aucun des dogmes édictés par Bill Plympton, c'est à dire « short, cheap, funny ». Mais pour le reste, on est gâté par des scénarios simples qui tiennent la route et le gag, comme Nullarbor, d'Alister (Colin) Lockhart et Patrick Sarell, qui file aussi droit que cette route d'Australie. Der grosse bruder, de Jesus Pérez et Elisabeth Hüttermann, se base non seulement sur un scénario simple et efficace, mais aussi sur une animation au trait qui fait plaisir à voir. Night sounds, de Jacob Stalhammar, réussit aussi son pari de plonger dans un cauchemar muet mais peuplé de bruits qui sont le fil rouge de sa pensée. A lost and found box of human sensation, de Martin Wallner et Stefan Leuchtenberg, aborde un sujet plus compliqué, mais de manière imagée, avec une ligne de conduite droite qui fait passer les bonnes émotions, sans tomber dans le pathos; il est simplement un peu dommage que cette animation se structure sur une voix off, plutôt que de laisser les images parler par elles-mêmes. Enfin, Miss Daisy cutter, de Laen Sanches, fait dans la facilité du clip; rythmé par la musique – le titre est Nux vomica -, le graphisme choisi est cependant un très beau choix, en noir et blanc parsemé de taches colorées et en hommage au comic américain.

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