Friday, October 8, 2010

Kaboom, de Gregg Araki

Smith a enfin dix-huit ans, et il quitte l'école pour entrer sur le campus. Smith est gay, enfin pas vraiment, il n'a pas encore décidé, il a une meilleure amie impertinente et lesbienne, un colocataire canon, un tuteur d'au moins trente ans et qui plane en permanence. Tout pourrait aller à merveille, si ce n'est que Smith, sortant d'une soirée haute en rebondissements, a de drôles de visions, plutôt réalistes. Stella croit fortement à la thèse du space-cake, mais Smith fait aussi des rêves qui ressemblent à des prémonitions, les évènements sont de plus en plus étranges, les hommes aux masques d'animaux de plus en plus présents, et la petite amie de Stella fait ce qui ressemble bien à de la sorcellerie.

Il me semble bien avoir vu déjà un film de Gregg Araki, Mysterious skin. Je n'en ai que peu de souvenirs, à part un sentiment insaisissable d'étrange. Kaboom, si je commençais par la conclusion, serait aussi de ce lot; pas franchement réussi en soi, mais dont l'ambiance est absolument inoubliable. Comme je suis très professionnelle et que je fais les choses dans l'ordre, je résumerai de nouveau cela à la fin de la critique. Maintenant, faisons comme si on ne savait rien du film, à part un pitch quelque peu obscur. Tout d'abord, il faut savoir qu'au visionnage de la bande-annonce, Kaboom m'avait parut extrêmement désagréable. Je l'avais immédiatement classé dans les films trop excentriques pour être honnêtement artistiques, catégorie teen-movies colorés. En lisant les nombreuses critiques élogieuses, j'ai été piquée de curiosité; pas possible qu'un film apprécié par la presse générale comme par la presse spécialisée, et celle pas forcément très tendre, soit complètement mauvais. J'y ai donc été avec un a priori négatif compensé par des lectures positives; bref, le niveau zéro de l'attente cinématographique.


Côté négatif, il y a cette accumulation de couleurs, de surexposition, de transitions de mauvais goût - cherchez les transitions en simulation 3D dans Final Cut. En somme, un concentré orgasmique de choix esthétiques où il y aurait à redire. Mais ces abus amusent le réalisateur, qui décide de ne pas se prendre au sérieux. Il n'est pas timide, et pioche joyeusement dans les effets qu'un monteur amateur de vidéos de vacances affectionne généralement. Un choix aussi radical est forcément volontaire, et je pardonne tout à des décisions qui le sont. D'autant plus que si la mise en scène est simple, et agrémentée de ces effets plutôt moches, la qualité de l'image est bien loin de la DV que le néophyte utilise pour filmer le mariage de ses enfants. Du coup, on a bien l'impression d'être au cinéma, et pas dans un salon lors d'une réunion familiale.


Ce qui donne du charme au film, assurément, c'est son histoire débridée. Il n'y a pas un seul instant où un évènement surréaliste ne surgit pas; chaque scène surprend par l'accumulation toujours plus grande de faits étranges. Les rêves, les prémonitions, les éléments de sorcellerie, la drogue et le sexe, tout y est. Ce grand bordel organisé part toujours plus dans le n'importe quoi, tout en suivant une logique implacable. Les personnages donnent d'ailleurs vers la fin une belle explication, détaillée, et irréfutable. Finalement, tout est logique, il suffit juste de croire aux fantômes, aux pouvoir psychiques et de se laisser emporter. Chaos, fin du monde, sexe, jouissances, Gregg Araki met en forme un fantasme de scénario.


Car il faut le dire aussi, la sexualité est, aussi, au centre du film. Ce qui lui a d'ailleurs valu la première Queer Palm du Festival. Si les mots sont crus, les images ne tournent jamais à la pornographie. Il s'agit ici plus de sexe décomplexé que de prétexte à montrer de la chair à tout bout de champ. Le sexe fait partie de la vie de ces jeunes qui se cherchent, et participe à leurs amitiés. Quant à la Queer Palm, ne vous y fiez pas. Smith est certainement en quête de son moi sexuel, mais Kaboom n'est pas un film sur l'homosexualité; il n'en fait ni l'apologie ni la critique, elle est juste un composant de son personnage, tout comme ses yeux bleus ou ses cheveux bruns.


La fin du film vaut certainement le détour. Sincèrement, le chef de la secte qui appuie sur le bouton rouge et boum, la terre explose... Fallait oser, non? Désolée, il fallait que je spoile ça - surlignez pour lire, mais ne surlignez pas si vous voulez voir le film parce que je vous l'ai vendu à merveille.


Pour revenir à mon propos de départ, Kaboom m'a laissé une excellente impression... pour un superbe pilote de série télévisée à bon budget. Au cinéma, c'est bien, mais la part hallucinogène se rapproche plus de la télé d'excellente facture.


Kaboom
de Gregg Araki
avec Thomas Dekker, Juno Temple, Roxane Mesquida,...
sortie française: 6 octobre 2010

2 comments:

Stéphanie L. said...

Mais oui j'ai eu l'impression d'avoir vu un épisode de série ou un téléfilm en sortant de la salle hier. Plus qu'étrange.

J'ai toujours un peu de mal avec les films qui partent "en vrille", comme "Atomic Circus" où j'ai vraiment l'impression qu'on se moque de nous. Mais là malgré tout, j'ai bien ri, les images sont assez jolies et on s'accommode de tout ce kitsch.

Malgré toutes les critiques positives du film, je pense davantage au mot "bizarre" avant le mot "génial".

Bref je suis assez d'accord avec ta conclusion :)

Anonymous said...

Repense au film comme une masturbation et il devient genial ! ( surtout le final ! ;-) !