Saturday, November 12, 2011

Bonsai, de Cristian Jimenez

Julio, jeune écrivain qui tente paresseusement de se faire éditer, manque de peu un job de rêve, celui de dactylographier quatre carnets rédigés par la main d'un célèbre écrivain, Gabriel Gazmuri. Sans vraiment savoir pourquoi, il ment à sa maîtresse, sa voisine, Barbara, qui lui sert de petite amie dans les moments de solitude, et lui assure qu'il y travaille dur. Aidé d'elle, il s'attelle alors à une drôle de tâche, écrivant à toute vitesse dans des cahiers d'écolier un roman, sur la base d'un pitch d'une seule ligne donné par Gazmuri. Il y raconte l'histoire d'amour de deux jeunes adolescents, Emilia et Julio. Il sait simplement qu'à la fin, Emilia meurt, et que lui vit. Le reste n'est que fiction.
 
 
Ou pas. Le génie du film réside justement, dans son scénario extrêmement malicieux, qui joue sur la vérité et la fiction. Tout d'abord, un film qui décide de raconter la vérité est un gros mensonge, auquel le spectateur adhère forcément d'emblée. Pris par l'histoire, il pourra dire ensuite "de tout manière, ce n'est pas la vérité", mais, durant la séance, il n'aura que cette réalité là à croire dur comme fer. Bonsai base sa vérité sur un autre mensonge, celui de Julio qui assure, au lieu d'assumer un texte de sa plume, retranscrire les mots d'un autre, écrivain reconnu. Il construit alors son histoire, celle du faux-Gazmuri, en racontant ses souvenirs. Il les embellit sans doute; il les change et les adapte. Et il connait alors la fin que connaîtront Emilia et Julio; l'une meurt, l'autre ne meurt pas. Mais qu'est devenue Emilia, aujourd'hui, alors que Julio invente leur passé?


Entre passé et présent, entre imaginaire et réalité, on pourrait croire aux complications, à la prise de tête permanente. Il n'en est rien, grâce à de savoureux liens entre chaque époque et chaque scénario. Il y a aussi un certain rythme, celui d'un Julio négligent, qui n'aime rien plus que son oisiveté, lire au lit et rêver entre les rayons d'une bibliothèque. Cette lente progression de la narration permet de réfléchir aux détails, et de combler les huit années qui séparent Emilia de Barbara. Parfois, on aimerait connaître un peu de l'adrénaline qui contraint Julio à se plier à la discipline de l'écriture, pour imiter celle de Gazmuri; il doit fournir les carnets d'écolier, un à un, à une Barbara qui lit et critique, sans peur de blesser l'écrivain qu'elle ne connaît pas - tiens, encore un mensonge qui peut-être ne tient pas. On aimerait avoir le souffle coupé avec lui alors qu'elle lit à voix haute et découvre les mots de son amant.


Bonsai se dévore comme on lit un roman; alors parfois, il fait bon de poser le bouquin, pour feuilleter un magazine, puis y revenir. Là, on est coincé pendant 95 minutes, et on aimerait parfois prendre le temps de rêver, quitte à ne pas aller trop vite... Bonsai se découvre aussi comme une petite plante fragile, et son visionnage n'en finit pas de grandir, même après la séance.


Bonsai
de Cristian Jimenez
avec: Diego Noguera, Natalia Galgani, Gabriela Arancibia,...
sortie française: 09 novembre 2011

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