Thursday, November 21, 2013

Les rencontres d'après minuit, de Yann Gonzalez

Un couple et sa soubrette attendent leurs invités, aux noms évocateurs: la Chienne, l'Etalon, l'Adolescent, la Star, font leur entrée. Une orgie sexuelle est attendue, mais au lieu d'un déballage de chair, les conversations s'engagent. Des rêves, des passés pleins de peurs, et la salive ainsi échangée, sous couvert d'érotisme, évoque aussi les sentiments.

Décidément, la culture nous réchauffe en cet automne hivernal. Le film annonce une partouze (c'est sympa, je crois que tous ces mots ramènent du monde sur mon blog. Petits pervers). Le décor est planté au milieu de l'hiver, dans une froide tour d'immeuble. Eric Cantona déclare mettre sa queue au centre de sa vie - et après son apparition, son quart d'heure de gloire, se cache. Des baisers sont partagés, mais l'extase ne vient pas de la chair. Dès le début du film, on sait que plus de mots seront partagés que de caresses.


Le huis-clos est mélancolique, mais contrebalancé par la crudité des mots et des désirs. Sous couvert de libertinage, chacun dissimule une plaie, un besoin exacerbé d'amour et de contact humain. Chaque avance physique est stoppée, un personnage s'opposant à ce qu'un autre prenne le contrôle de la soirée. Ces interruptions inattendues frustrent la petite assemblée, qui, pour se décharger, utilise alors le moyen de la parole. Shame, de Steve Mc Queen, montrait une sexualité à l'opposée de celle proposée par Yann Gonzales. Le héros était seul, incapable de s'exprimer, de mettre des mots sur ses désirs intenses. Le film était dense et l'ambiance pesante. Les rencontres d'après minuit permet à ses personnages de tout verbaliser. Leurs tristes histoires les apaisent alors enfin, autant que les rapprochements physiques.


Des mots et de la tristesse? Ce n'est pas très engageant. Mais imaginez ce contexte, dans lequel les personnages se retrouvent: ils se sont fait beaux pour se séduire, ne se connaissent pas et se retrouvent dans un appartement fait pour l'amour; en s'approchant d'une console, ils peuvent mettre en musique (par M83), leur état d'esprit du moment. Tout se passe comme prévu et soudain... ils sont privés de tout ce à quoi ils s'attendaient. Leurs insatisfactions sont mises en scène de manière stylisée, ce qui accentue le comique de leurs maux.


Ces derniers, imagés, font intervenir le cinéma fantastique, avec ses créatures vampiriques; ou le cinéma expressioniste, avec son raffinement extrême. Les styles se mélangent harmonieusement, tout comme le rire et la volupté.


Un film expérimental et lisible, au sexe risible et à la portée moins pornographique qu'il pourrait sembler... ça a interêt à attiser votre curiosité, ou alors, je ne sais pas ce que vous venez faire sur ce blog!


Les rencontres d'après minuit
de Yann Gonzalez
avec: Kate Moran, Niels Schneider, Nicolas Maury,...
sortie française:  13 novembre 2013

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