Wednesday, February 8, 2012

Tatsumi, d'Eric Khoo

Yoshihiro Tatsumi a raconté en manga, dans Une vie à la dérive, sa vie, depuis l'enfance dans un Japon d'après-guerre et marqué par la bombe nucléaire, la maladie de son frère, la pauvreté de sa famille et l'absence de son père, en passant par sa rencontre avec son idole Osamu Tatzuki, jusqu'à sa vie d'adulte. Dans cette auto-biographie animée s'intercalent les personnages de ses histoires, souvent sombres, d'adultes en proie à l'angoisse, à la guerre, au sexe. Ces cases de mangas légèrement animées, en 2D, pour conserver le trait de l'artiste mangaka, sont les débuts du genre gekiga que Tatsumi a créé puis contribué à promouvoir, un genre adulte qui a élargi le public du manga classique tourné vers les enfants.


Eric Khoo a voulu ce film en hommage à Tatsumi, et pour rétablir l'importance de son influence sur le manga. La structure de son récit met en parallèle de grands moments de la vie du mangaka et ses propres personnages, inventés. Les premières de ces séquences sont tirées de son autobiographie, Une vie à la dérive, et les secondes proviennent tout droit de son imagination. Le film n'est donc que semi auto-biographique, réalisé par quelqu'un d'autre, mais sur la base des mots et des images de Tatsumi. Le choix des histoires animées est revenu à Eric Khoo, cinéaste venu de l'image dite live (My magic, Be with me,...) et n'ayant jamais touché à l'animation auparavant.


L'entrelacs des séquences peut paraître étrange et incompréhensible. Les personnages juste sortis des cases des mangas s'animent juste suffisamment pour leur donner la vie. Evidemment, nés de la même plume, leurs ressemblances sont parfois confondantes et, d'une séquence à l'autre, on ne sait plus si on a affaire aux héros de Monkey mon amour, L'Enfer, Juste un homme,... ou à Tatsumi. L'embrouillamini des historiettes est peut-être volontaire, liant intimement un homme et son œuvre, mais il est surtout déstabilisant.


Le film est donc à réserver aux fans du genre manga, finalement plus adapté aux lecteurs invétérés qu'aux cinéastes passionnés d'images mouvantes, même d'animation. Il est néanmoins une plongée historique dans le Japon, son Histoire et l'histoire d'un genre manga, ce dernier si différemment conçu et consommé qu'en nos pays occidentaux. Le travail du mangaka y est décrit sans complaisance, comme gagne-pain épuisant tout autant qu'expression artistique.


Tatsumi
d'Eric Khoo
sortie française: 1er février 2012

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