Monday, February 13, 2012

Un monde sans femmes, de Guillaume Brac

Un monde sans femmes, c'est un peu celui dans lequel vit Sylvain, pataud, trente ans, célibataire dans sa petite ville normande. C'est un trou, comme on dit communément, où tout le monde se connaît et où on reste vieux garçon si on n'a pas grandi avec sa future épouse et qu'on ne l'a pas faite sienne avant vingt ans. Les rares rencontres sont celles qui arrivent l'été, quand des touristes, peu nombreux, débarquent sur les galets. Une semaine magique durant laquelle débarquent une mère et sa fille, Patricia et Juliette, qui louent un appartement à Sylvain. Il tente, maladroitement, de leur tenir compagnie.


On parlait dernièrement de salles indépendantes; il y a aussi cette culture du court-métrage, plutôt développée en France dans sa production, mais qu'on ne rencontre pas vraiment sur les écrans. Année zéro est une petite boîte montée probablement par trois copains, dont Guillaume Brac, le réalisateur, sorti de la FEMIS en 2005, d'Un monde sans femme. Celui-ci dure tout de même 57 minutes, et pourrait être de la catégorie du moyen-métrage. Heureusement pour lui, cette catégorie n'existant pas aux Césars, c'est en tant que court que le film y est nominé cette année. Un monde sans femmes est précédé de son prologue, Le naufragé, où l'on retrouve Sylvain, interprété par Vincent Macaigne, et la petite ville d'Ault.


Plusieurs choses transparaissent avec une aisance étonnante dans ce film d'un tout jeune réalisateur. Il y traite à la fois du milieu rural, légèrement péquenot avec ses boîtes de nuit sans chichis et ses dragueurs de jour sur plages caillouteuses, ses connaissances inévitables - on dit bonjour à chacun et à tout le monde, et ce n'est certainement pas la fraîcheur des deux nouvelles venues dans la ville qui va passer inaperçue -, son bar et ses soirées tristes quand tout ferme à 22h. Mais ce n'est pas le thème du film, et ce contexte est subtilement laissé en arrière-plan... exactement à sa place, tout comme le thème d'une relation mère-fille bousculée par la société - divorce, jeunesse, adolescence,...


Le vrai sujet, c'est la solitude, et pas l'opposition campagne/ville, qui arrive dans la conversation pour meubler, parce que c'est ce qu'on se dit dans ces moments-là de rencontre, de peut-être et d'avenir envisagé, plutôt que d'aborder le vrai sujet. Les dialogues sonnent justes, pile entre le parler d'aujourd'hui et le dialogue de cinéma, ni trop écrit ni trop entendu. Justement interprétées, ces solitudes se fréquentent, s'affrontent, se toisent. Le résultat est un peu triste, plutôt pessimiste, et chacun retombe dans ses pensées, comme après avoir partagé un moment fort quand on se retrouve au point de départ.


C'est un étonnant diptyque que certaines petites salles nous permettent de voir, hors du circuit traditionnel. N'hésitez pas à découvrir, probablement avant tout le monde, un réalisateur dont on entendra de nouveau parler.



Un monde sans femmes
de Guillaume Brac
avec: Vincent Macaigne, Laure Calamy, Constance Rousseau,...
sortie française: 08 février 2012

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