En fermeture du festival de Cannes cette année, il y avait L'arbre, pour remplacer le film annoncé par les rumeur, Tree of life, de Terrence Malick. Je ne sais pas si Cannes y a gagné au change, mais le festival n'y a certainement rien perdu. Dawn et Peter vivent dans un coin paumé de l'Australie, dans une maison de bois posée à l'ombre d'un immense figuier. Leurs quatre enfants s'épanouissent dans cette nature encore sauvage. Peter meurt soudainement, emporté par une crise cardiaque au volant de sa voiture, qui termine sa route contre le tronc du grand arbre. Dawn et ses quatre enfants, du plus grand Tim, qui rêve d'abandonner les responsabilités qui lui retombent sur les bras pour partir à Sidney, au plus jeune, Charlie, qui du haut de ses trois ou quatre ans, ne parle pas, en passant par le rebelle Lou, tendre sans l'avouer, et par Simone, la plus visiblement bouleversée, chacun fait son deuil à sa manière. La famille, volontairement ou non, se rassemble autour du grand figuier, qui communique avec ses moyens naturels et les rassure, les protège ou s'affranchit d'eux.
Étrangement onirique, l'intervention de l'arbre est justifié par le crédit que lui donne la petite Simone. Croyant dur comme fer que son père s'est réincarné dans son tronc, ses branches, ses feuilles et ses racines, elle lui parle chaque jour, entend ses réponses, rit en retour et y installe un petit lieu de culte, comme une enfant peut imaginer un autel. La force de sa foi est telle qu'on en vient à croire aussi, comme elle, aux signes de la nature. En rappel subtil du chamanisme australien, les animaux s'introduisent dans la maison de bois aux fenêtres perpétuellement ouvertes: des grenouilles, une chauve-souris, les phénomènes climatiques. Ces évènements somme toute ordinaires dans les vastes étendues de l'Australie prennent un caractère soudainement mystique, comme si la nature vibrait au rythme du deuil des O'Neill.
Simone ne confie son secret, sa découverte qu'à sa mère. Pourtant, tous les enfants se réunissent, en cachette des autres, autour du grand figuier. L'attirance, qui pourrait paraître morbide, de chaque membre pour le lieu où leur père est décédé, offre un support poétique et imagé de leur deuil. Le plus âgé des enfants souhaite s'en éloigner, s'en débarrasser; le plus jeune joue l'indifférence, et s'enferme sans sa bulle d'enfance; c'est d'ailleurs une surprise de comprendre les sentiments de ce gamin aux boucles blondes, toujours déguisé de costumes étranges, ne communiquant que par onomatopées et regards suppliants. La tête dure de Lou, moins angélique que celles de ses frères et sœurs, cache cependant un cœur blessé et il dissimule son amour pour son père dans la nuit. Quant à Simone, c'est elle qui prend la plus grande place dans le film, exprimant fougueusement son désarroi quant les autres cherchent à le dissimuler.
La jeune actrice, totalement novice, amorce là une jolie carrière, mettant à profitant un minois mignon et surtout son caractère entier. Elle possède des airs matures, cachés sous un regard azur, et sait en tirer profit pour montrer sa fragilité et sa propension à encaisser les coups. A la fois forte, dure, et sensible, Morgana Davies est à suivre de près sur le chemin de l'adolescence. A côté d'elle, sa mère, interprétée par Charlotte Gainsbourg, lui oppose son visage tourmenté. Dawn déprime, tandis que sa fille se trouve un exutoire; elle se reconstruit, amorce un virage tandis que Simone, obstinée, dort dans les branches du figuier. Influençable, l'adulte se trouve contaminée par la croyance de l'enfant, et voit aussi des signes dans la course du vent ou dans les changements climatiques.
Cette lente reconstruction de toute une famille dépourvue de leur ciment est de plus servie par une belle image, qui sait s'arrêter et laisser le spectateur apprécier la beauté des paysages. Rien n'est cependant laissé au hasard, et la caméra ne stoppe pas juste pour le plaisir des yeux; tout a un sens, dans ce que filme Julie Bertuccelli, et la réalisatrice dirige le regard à l'endroit exact où une écorce, un bruissement des feuilles, un geste d'enfant, traduit des sentiments sur lesquels il est difficile de poser des mots.
Très beau film film d'une femme qui sait s'exprimer par l'image, et laisser les comédiens libres de sublimer un personnage déjà juste au scénario. La réalisatrice s'est inspirée d'un roman, Our father who art in the tree, de Judy Pascoe. Quelqu'un l'a-t-il lu?
Étrangement onirique, l'intervention de l'arbre est justifié par le crédit que lui donne la petite Simone. Croyant dur comme fer que son père s'est réincarné dans son tronc, ses branches, ses feuilles et ses racines, elle lui parle chaque jour, entend ses réponses, rit en retour et y installe un petit lieu de culte, comme une enfant peut imaginer un autel. La force de sa foi est telle qu'on en vient à croire aussi, comme elle, aux signes de la nature. En rappel subtil du chamanisme australien, les animaux s'introduisent dans la maison de bois aux fenêtres perpétuellement ouvertes: des grenouilles, une chauve-souris, les phénomènes climatiques. Ces évènements somme toute ordinaires dans les vastes étendues de l'Australie prennent un caractère soudainement mystique, comme si la nature vibrait au rythme du deuil des O'Neill.
Simone ne confie son secret, sa découverte qu'à sa mère. Pourtant, tous les enfants se réunissent, en cachette des autres, autour du grand figuier. L'attirance, qui pourrait paraître morbide, de chaque membre pour le lieu où leur père est décédé, offre un support poétique et imagé de leur deuil. Le plus âgé des enfants souhaite s'en éloigner, s'en débarrasser; le plus jeune joue l'indifférence, et s'enferme sans sa bulle d'enfance; c'est d'ailleurs une surprise de comprendre les sentiments de ce gamin aux boucles blondes, toujours déguisé de costumes étranges, ne communiquant que par onomatopées et regards suppliants. La tête dure de Lou, moins angélique que celles de ses frères et sœurs, cache cependant un cœur blessé et il dissimule son amour pour son père dans la nuit. Quant à Simone, c'est elle qui prend la plus grande place dans le film, exprimant fougueusement son désarroi quant les autres cherchent à le dissimuler.
La jeune actrice, totalement novice, amorce là une jolie carrière, mettant à profitant un minois mignon et surtout son caractère entier. Elle possède des airs matures, cachés sous un regard azur, et sait en tirer profit pour montrer sa fragilité et sa propension à encaisser les coups. A la fois forte, dure, et sensible, Morgana Davies est à suivre de près sur le chemin de l'adolescence. A côté d'elle, sa mère, interprétée par Charlotte Gainsbourg, lui oppose son visage tourmenté. Dawn déprime, tandis que sa fille se trouve un exutoire; elle se reconstruit, amorce un virage tandis que Simone, obstinée, dort dans les branches du figuier. Influençable, l'adulte se trouve contaminée par la croyance de l'enfant, et voit aussi des signes dans la course du vent ou dans les changements climatiques.
Cette lente reconstruction de toute une famille dépourvue de leur ciment est de plus servie par une belle image, qui sait s'arrêter et laisser le spectateur apprécier la beauté des paysages. Rien n'est cependant laissé au hasard, et la caméra ne stoppe pas juste pour le plaisir des yeux; tout a un sens, dans ce que filme Julie Bertuccelli, et la réalisatrice dirige le regard à l'endroit exact où une écorce, un bruissement des feuilles, un geste d'enfant, traduit des sentiments sur lesquels il est difficile de poser des mots.
Très beau film film d'une femme qui sait s'exprimer par l'image, et laisser les comédiens libres de sublimer un personnage déjà juste au scénario. La réalisatrice s'est inspirée d'un roman, Our father who art in the tree, de Judy Pascoe. Quelqu'un l'a-t-il lu?
L'arbre
de Julie Bertuccelli
avec Charlotte Gainsbourg, Morgana Davies, Marton Csokas,...
sortie française: 11 août 2010
1 comment:
J'ai beaucoup aimé le film car même si l'histoire peut vite sombrer dans le 'nian nian', les comédiens lui donnent une allure sublime.
Bises!
M.
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