Selon ses dires, Not est le plus vieux punk d'Europe. Il fait sa révolution dans un bled de province française. A la suite d'une conversation avec son frère, une dispute plutôt, il décide de "déménager" du centre-ville à la zone commerciale avec son chien 8.6. Alors qu'il erre de chariot en rond-point et hante l'espace où sa mètre et son père tiennent un restaurant de patates, où son frère Jean-Pierre vend des matelas, Jean-Pierre, quitté par sa femme, poussé à bout par son patron, pète un câble et devient sans le vouloir aussi punk que Not, enchanté de ce changement et fier de cette prise de liberté.
Attention, on parle ici d'un genre de punk bien spécifique, le punk à chien français qu'on retrouve à Bastille à Paris, ou dans toutes les villes de province. C'est un type de punk qui semble n'appartenir qu'à nous - et nous n'avons pas à en être fier -, mais qui hante probablement toute l'Europe. Les pays riches produisent ce genre de révolutionnaires de pacotille, qui vivent à la fois hors du système et sur les deniers de celui-ci. Leur refus de consommer accepte des digressions: pour de la mauvaise bière, ils donnent leur mendicité à Bavaria, et n'hésitent pas à dépenser leurs deniers en croquettes pour chien. Sans doute pour se nourrir, ils achètent également chez McDo. Rejetant en bloc toutes les étiquettes, de bobo bio à provincial, père, frère, il ne font finalement que bien peu de tort au système qui s'en fiche bien.
Not est donc de ceux-là cliché en diable; mais comment le dépeindre autrement? Croisez un punk à chien dans la rue, il ressemblera exactement à ces clichés. Benoît Poelvoorde enchaîne donc les pauses "punk à chien", n'est fidèle qu'à sa bête, partage avec lui sa 8.6, tire des cigarettes au hasard, pisse contre les murs et n'est reconnaissant pour personne. Et, comme s'il avait raison, Jean-Pierre devient Dead et suit le même chemin. Aimer ce film serait reconnaître que l'anarchie, mouvement rêveur qui commence par haïr tout le monde puis rétablit la paix en comptant sur l'amour des gens et leur bonté, est une solution. Not, punk à chien toute sa vie, n'a même pas entamé la première étape de ce programme révolutionnaire et idéaliste. Dead l'aidera un peu, mais il se heurtera finalement à l'indifférence des autres gens, tout comme Not.
Là où le film réussit quelques scènes cependant, c'est dans la peinture de cette indifférence, de la non volonté de quiconque à réagir, à la prière, au dénuement, et même au suicide. Mais même Not et Dead participent à l'indifférence qu'ils combattent mollement, en ne tendant pas plus la main au désespéré qu'ils croisent. Seule vraie scène punk du film, l'image quasi finale d'un pendu dans un manège, mort de manière joyeuse, originale, punk quoi! Mais bien mort tout de même.
Alors, is punk dead? Il semblerait bien, tant l'inutile reconversion de Jean-Pierre ne lui sauve pas la vie, ni ne lui rend sa famille.
Le grand soir
de Benoît Delépine et Gustave Kervern
avec: Benoît Poelvoorde, Albert Dupontel, Brigitte Fontaine,...
sortie française: 06 juin 2012
ps: l'affiche est un très chouette hommage légèrement mégalo à la géniale série Panique au village, réalisée par Benoît Délépine et Gustave Kervern. CowBoy! Indien! Cheval!!
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