Polisse est la plongée 24h/24 au sein d'une équipe de la Brigade des mineurs. Ils reçoivent les enfants qui n'osent pas avouer les attouchements des adultes; les adolescents vieillis trop tôt qui se donnent sans scrupule; les mères qui se jugent indignes; les pères qui ne voient pas où est le mal; des enfants exploités;... Des milliers de cas, jamais les mêmes, que cette équipe digère chaque jour. Et le soir, il faut rentrer chez soi et faire comme si la journée était finie, alors que les injustices continuent et reprendront leur litanie le lendemain.
C'est rigolo, en relisant mes vieilles critiques, je me souviens de l'état dans lequel m'a mis tel ou tel film. Je ne me rappelais pas avoir vraiment aimé Le bal des actrices. Un seul film n'avait pas réussi à changer ma vision de la Maïwenn-actrice, de la Maïwenn arriviste, opportuniste, grandie dans le bon milieu et sans affronter trop de problèmes. Cette image est forcément fausse, qui connaît vraiment Maïwenn, qui connait réellement n'importe qui sans l'avoir rencontré? A travers des films cependant, une autre image s'esquisse. La réalisatrice parle d'elle-même, en racontant les autres. Son regard donne à comprendre quelque chose d'enfoui en elle. Maïwenn reste agaçante et privilégiée. Elle ne sait pas écrire un scénario, ni préparer un tournage; elle ne sait pas tenir une caméra. Mais elle sait extraire le meilleur des acteurs, qui sont autant ses amis que des collègues. Elle possède une sorte de grâce maladroite, et l'envie de raconter justement. Polisse possède un peu moins de défauts que Le bal des actrices. Il est également loin d'être parfait, mais Maïwenn s'approche de plus en plus de sa vérité, gommant les aspérités, restant personnelle sans oublier le spectateur.
L'immersion dans le quotidien de cette brigade, où se mêlent les amitiés et quelques ressentiments, est complète. Ces collègues vivent chaque journée tous ensemble, traînent, forcément, ensemble, le boulot terminé. Ils sont amis dans la vie autant que dans leur travail. Les tensions cependant qu'ils ressentent face aux témoignages d'enfants violés, manipulés, aux aveux des adultes, restent en permanence collées à leur peau; et une proximité aussi étroite avec des collègues influe évidemment sur le long cours, en bien ou en moins bien; influe également sur ce qui se passe à la maison, avec un conjoint qui ne peut pas imaginer les horreurs qu'ils découvrent chaque jour. Le film de Maïwenn est extrêmement documenté, réaliste, dans ce qu'il donne à voir de la brigade; mais au-delà du docu, c'est une histoire, un film, qui est réalisé.
Le personnage interprété par Maïwenn elle-même est effectivement de trop, et ajoute du sentiment là où on ne voulait pas en voir; chaque personnage était suffisamment fort pour tenir le scénario sans avoir recours à l’œil extérieur d'une photographe introduite dans l'équipe; elle parasite les tensions, prend trop d'importance par rapport à tous ceux qui sont ses personnages principaux. Elle jette un voile de romantisme sur un univers qui se veut plus réaliste que cela.
Cela ne lui ressemble cependant que plus. En réalisant ce film, Maïwenn dévoile son âme d'enfant. Aussi innocente et immature dans sa réalisation que les gamins qu'elle suit, elle apporte une fraîcheur au cinéma, et un regard adulte. On ne peut pas totalement lui demander de grandir, car c'est ça, qu'on aime, une expérience accomplie parfois maladroitement avec un grand cœur.
Polisse
de Maïwenn
avec: Karin Viard, Marina Foïs, Joeystarr,...
sortie française: 19 octobre 2011
2 comments:
"sans affronter trop de problèmes"?
Est-ce que tu as vu"Pardonnez-moi"?..
@Anonymous
Certes, mais tout est relatif... Elle aurait pu naître au fin fond de la Somalie, et ne jamais croiser la route de Besson non plus, vois-tu... Je n'ai pas dit qu'elle avait vécu une enfance rose dans le monde des Bisounours ;)
En fait, étant donné que ce film n'est pas autobiographique, et qu'elle ne joue pas, pour une fois, son propre rôle, je ne voulais justement pas trop m'attacher à sa vie personnelle en regardant Polisse. Quand je dis "elle n'a pas rencontré trop de problèmes", je mets ça plutôt dans un contexte professionnel; elle a tout de même couru très jeune les castings, et rencontré Luc Besson à 15 ans; et sa sœur s'est bien débrouillé pour faire aussi son bonhomme de chemin. Quand quelqu'un décide de produire Maïwenn et de lui laisser une caméra, c'est grâce à cela. Elle ne s'est pas battue pour se faire reconnaître dans le milieu cinématographique, on lui a offert sa chance. Elle l'a prise et en fait quelque chose de fort bien maintenant!
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