Thursday, September 8, 2011

Blackthorn, de Mateo Gil

Butch Cassidy est censé être mort en 1908; son corps aurait été retrouvé quelque part en Bolivie où il a passé les dernières années de sa vie, avec son pote brigand The Sundance Kid et la compagne de ce dernier, Etta Place. Mais si Etta est finalement retournée aux Etats-Unis, et The Sundance Kid est bien mort entre ses bras, Butch Cassidy a rangé son revolver et s'est consacré durant vingt ans à l'élevage de chevaux. Pendant ces vingt années, il n'a cessé d'écrire à celui qu'il considère comme son neveu, le fils d'Etta et de The Sundance kid, né aux Etats-Unis. Ayant amassé un bon pactole, il prend enfin le chemin du retour... Sur lequel il se fait piquer son cheval et tout le magot par un Espagnol abruti. L'Espagnol, du nom d'Eduardo, perd également le cheval et les quelques 6000$, mais promet un butin plus important si le nommé James Blackthorn, ex-Butch Cassidy, l'aide à semer ses poursuivants et à atteindre la mine dans laquelle il a dissimulé l'argent.


Blackthorn, sur le papier - le web-papier -, peut apparaître comme un western. Dans les faits, le film est plus subtil, reprend les codes du genre, les actualise sans tomber dans la grossièreté, et ajoute des thèmes plus contemporain qu'au bon vieux temps du western-spaghetti. Le film devient alors un produit tout à fait différent du western. Les rythmes y restent lents, les cadres larges, les paysages spacieux et les montagnes décharnées; les hommes s'y déplacent à cheval, couverts de poussière, et les blancs Américains ont colonisé un peuple qu'ils méprisent, enfermés dans leurs clubs, sirotant un whisky bien de chez eux; certains s'intègrent plus que d'autres et même fricotent avec l'autochtone, mais ne se sentent pour autant pas chez eux. L'or se peint sur des billets verts mais est toujours la carotte pour laquelle se déchirent colons et colonisés; la liberté aussi est un attrait pour tous.


Jusque là me direz-vous, on est en plein dans le western. Oui, mais. Les coups de feu qui sont tirés le sont vite, et bien. Pas d'explosion, pas de gros pétards, pas de bain de sang, les batailles sont avant tout psychologiques, pleines de sang-froid, et expéditives comme des meurtres japonais, efficaces et propres. Il y en a d'ailleurs peu, le réalisateur ne succombe pas à une certaine surenchère d'action qui fait du bien aux producteurs généralement. Et cette absence d'action fait un bien fou. J'ai adoré les silences dans des déserts de sel - silhouettes noires sur sol blanc et ciel pâle -, le peu de mots de Butch Cassidy habitué à sa solitude, contrastant avec le flot de paroles d'un Espagnol très beau et peu adapté au rude climat bolivien; en privant le spectateur des habituels massacres, Mateo Gil crée un manque qui excite l'imagination.


Ok, les flash-back m'ont semblé un peu simplistes, pas forcément bien introduits, très explicatifs; mais ils relancent bien la machine d'une vengeance longuement murie, et posent les bases d'une très crédible lassitude d'étrangers bien lotis dans un pays sauvage où ils ne se sentent pas à leur place.


J'ai mis un temps fou à pondre ce petit avis, alors que j'ai adoré ce film. Probablement que la sensation de sécheresse, de rudesse, qui passe à travers de Blackthorn, m'est difficile à retranscrire avec des mots. On y sent l'odeur de la poudre, et celle de la sueur, et de la terre aride; le déracinement et l'isolement. Mieux vaut aller expérimenter toutes ces sensations au cinéma et les garder pour soi.


Blackthorn
de Mateo Gil
avec Sam Shepard, Eduardo Noregia, Stephen Rea,...
sortie française: 31 août 2011

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