Wednesday, March 11, 2009

Boy A, de John Crowley

Terry, éducateur social, offre une nouvelle vie à Eric, qui sort à peine d'une longue peine de prison où il a passé toute son adolescence, depuis l'âge de 11 ans. Eric s'appelle à présent Jack et se fait de nouveaux amis dans une petite ville anglaise où il travaille dans une entreprise de transports. Jack tombe amoureux; Jack sauve une fillette d'un accident de voiture et se fait acclamer par la presse locale; mais Jack est aussi étouffé par l'anonymat d'Eric, par le secret de son ancienne vie. Le jour où son secret est dévoilé, personne ne lui fait plus confiance; la presse nationale frappe à sa porte; Eric fuit.


Le scénario, adapté du roman Jeux d'enfants écrit par Jonathan Trigell, est un excellent point de départ. A la fois traitant d'un sujet social, sur la ré-insertion de jeunes ex-prisonniers ayant purgé leur peine et d'un thème humain, sur un garçon apprenant à vivre en société, à découvrir tout ce qu'il n'a pas pu découvrir en prison, à changer de vie. Sa timidité est touchante, polie, son envie de s'intégrer est maladroite et sincère.


Mis en scène de manière très classique, simple, le film est construit autour de flash-backs qui montrent le jeune Eric, enfant chahuté par ses camarades de classe, qui ne trouve pas de réconfort ni auprès de son père, absent, ni de sa mère, atteinte d'un cancer et en permanence dans son lit. On découvre son amitié grandissante avec un autre enfant, violé par son frère, qui lui fait découvrir le sang et la violence. Les deux jeunes garçons ont 11 ans lorsqu'ils tuent une de leur camarades de classe. Le procès les condamnera à la peine maximale, et leur entourage ne leur pardonnera jamais. Jack, parfaitement interprété par Andrew Garfield, revivant ces images en permanence, torturé par elles, vivant avec peine le fait de devoir mentir à son entourage, est un personnage des plus émouvant. Cependant, si l'émotion surgit, le bouleversement ne vient jamais.


Est-ce à cause de la réalisation, trop classique, un peu plate, un peu lente? Je ne suis pas particulièrement fanatique des rythmes insoutenables, des cuts à outrance; mais un minimum de tentatives d'innovation aurait été plus souhaitable. La scène d'amour notamment, qui aurait pu être d'une grande intensité, si l'on se base sur le fait que Jack découvre le sexe pour la première fois. Les nombreux flous, les focales volontairement pudiques, font plutôt ressembler ce grand moment à une vidéo porno amateur.


Est-ce à cause du point de départ, trop pardonnable? En effet, les nombreux flash-backs dévoilent un jeune Eric influençable, isolé, sans modèle parentale ni amical, tandis que son ami Philip est celui qui l'entraînera haineusement vers le meurtre et la prison. Il est du coup difficile de croire à l'emprisonnement d'un si jeune garçon, qui a de multiples raisons de recevoir une peine moins lourde. Et comment croire à cette animosité tenace de gens rêvant de se venger d'un petit garçon, des années plus tard?


Est-ce la faute à ce retournement de situation, incongru? En effet, tout bascule lorsque la vérité sur Eric est dévoilée par le fils de Terry. Revenu de nulle part chez son père, on assiste à quelques conversations entre Terry et lui; ces échanges ne témoignent pas d'une grande tendresse entre le père et le fils, qui ressemblent plus à deux bons amis. Terry dans son sommeil, murmure une seule fois que la ré-insertion d'Eric/Jack est sa plus belle réussite, et cela suffit à mettre son fils dans une rage folle. Ce qui s'ensuit est plus absurde encore; la fille qui l'aimait tant, censée être amoureuse et intelligente, refuse purement et simplement de répondre à ses coups de fil. Jack s'enfuit alors, et le film se conclue de manière trop aisée, sur la promesse d'un suicide, image qui est restée en suspens tout le temps dans la pensée de Jack, se souvenant du sort de son ami Philip.


Boy A était un film prometteur, et s'est révélé être plus que décevant.




Boy A
de John Crowley
avec Andrew Garfield, Peter Mullan, Katie Lyons,...
sortie française: 25 février 2009

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