Saturday, August 21, 2010

Crime d'amour, d'Alain Corneau

Jeune et ambitieuse, Isabelle se laisse néanmoins vampiriser par sa supérieure, la charismatique Christine. Au sein de l'entreprise, seul Daniel, son assistant, voit les crocs de Christine et les marques sur le coup d'Isabelle. Ensorcelée, Isabelle fait profiter sa chef de ses excellentes idées et, pour se rapprocher encore d'elle, tombe sous le charme de son collègue et amant. Poussée par Daniel, Isabelle prend toute de même une initiative sur un dossier qui s'emballe avant qu'elle ne puisse tout confier à Christine. Isabelle se retrouve alors en concurrence avec sa supérieure pour un poste à New York. Christine ne le supporte pas et enchaîne les humiliations pour sa jeune collègue. Isabelle ne le supporte pas et tombe dans une dépression qui ressemble aussi à une vengeance bien planifiée.


Tirée à quatre épingles, chignon haut serré, tailleur et talons hauts, lunettes sur le bout du nez, Ludivine Sagnier a tout de la jeune première. Son air enfantin et naïf sied aussi bien à son rôle de jeune cadre intelligent et ambitieux qu'à son amitié intense, admirative et subjuguée, pour une femme plus mûre, sûre d'elle, forte et qui s'impose dans un monde d'hommes. Kristin Scott Thomas réussit également à endosser la veste de Christine avec brio, dure en affaire, doucereuse dans le privé, toujours égoïste. Le charme incontestable de l'actrice colle au caractère de cette femme aux dents longues. Elle interprète une Christine parfaitement opportuniste, au charisme froid et dévastateur.


Cependant, le talent de deux actrices ne saurait faire oublier un désastreux scénario tissé de fils blancs. Plaçant cette histoire de harcèlement moral dans un monde du travail à la hiérarchie établie, au costume/cravate de rigueur, le réalisateur fait grimper les enchères: il accompagne ce contexte à angles droits d'une mise en scène clinique. Aucune imagination de réalisation, des cadres rigoureux, le film est visuellement très ennuyeux. Le scénario est lui aussi implacablement monotone. Les évènement s'enchaînent, entrecoupés de flash-back d'un noir et blanc soporifique dès qu'une explication est nécessaire. La moindre action coule de source. C'est d'un oeil morne, jamais surpris que l'on suit un processus d'humiliations/dépression assommant.


Comment, dans ce contexte, prendre partie pour cette pauvre Isabelle dont la vengeance démesurée est à la fois injustifiée - puisqu'on n'a pas de sympathie pour elle ni pour ses malheurs, ni de totale antipathie pour Christine -, évidente - la vengeance d'Isabelle est si calculée qu'on ne croit pas un moment à une véritable dépression - et indispensable - parce que oui, certes, il ne fallait pas se laisser marcher sur les pieds par Christine. Le mécanisme de son esprit intelligent est aussi froid que la mise en scène d'Alain Corneau. Sa vengeance, exécutée longuement, implacablement, ne laisse pas la place à la moindre faute. Le spectateur ne tremble pas pour elle, ne doute pas du dénouement que la jeune femme, organisée, maniaque, carrée, a prévu; pas de compassion donc pour ce personnage trop parfait, sans erreur.


Voilà donc l'un des films les moins excitants vus ces derniers temps.


Crime d'amour
d'Alain Corneau
avec Kristin Scott Thomas, Ludivine Sagnier, Patrick Mille,...
sortie française: 18 août 2010

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