Friday, March 8, 2013

Session canap' #5 - Total recall, de Paul Verhoeven

Oui, je sais, je ne quitte plus mon canapé... Mais que voulez-vous, ces deux dernières semaines, les sorties cinéma ne m'ont vraiment pas motivée. Je ne sais ce qui s'est passé dans mon subconscient pour que je regarde un film avec Schwarzenegger. J'ai beau aimer la science-fiction, il me fallait quand même surpasser ma répugnance pour ce type. Je n'ai pas regretté le voyage. Total recall manquait, d'une part, à ma culture pop, et la plongée dans le cinéma sans tabou des années 90 - sans tabou... dans une certaine mesure - est un vrai bain de jouvence.

Dans un futur proche - le film est sorti en 1990, et se situait alors presque cent ans plus tard, en 2084 -, Douglas Quaid vit sur Terre, mais fait d'étranges rêves se situant sur Mars. Pour aller y voir de  plus près, sans cependant y mettre les pieds, car sa jolie femme s'y refuse, Quaid demande à une entreprise spécialisée de lui implanter des souvenirs de vacances sur la planète rouge. L'expérience tourne au désastre, et Quaid ne sait plus distinguer le rêve de la réalité. Les souvenirs qu'on devait lui implanter ne seraient-ils pas, au contraire, sa véritable identité?


Le film est censé être très différent du roman de Philipp K. Dick dont il est tiré. Le livre se déroule sur Terre, tandis que le film place son action sur Mars, en grande partie. De toute manière, je ne jugerai pas ce scénario un peu bancal, qui pose rapidement des questions d'ordre métaphysique sans vraiment les développer. Il s'agit que le spectateur ait juste assez d'éléments pour être fasciné par la manipulation de l'esprit possible dans le futur. Total recall vaut le détour, d'abord si vous pensez qu'il fait partie d'un certain bagage culturel, et pour deux points fascinants.


Le premier, et c'est pour cela que j'abordais en introduction la liberté des années 90, c'est la masse d'hémoglobine qu'on trouve dans le film. Aujourd'hui, le pire des films-catastrophes fera s'écrouler une ville entière sans qu'on voit la moindre goutte de sang. Eventuellement, parfois, un méchant périt, sans trop se donner en spectacle. Mais un simple passant aura toujours le temps de se jeter contre un mur lors d'une course-poursuite en voiture. Total recall ne s'embarrasse pas d'être grand public. Il y a même des badauds, parfaitement innocents, qui se jettent sous des taxis. Gratuit. Il y a du sang sur tous les plans. Lorsqu'on croit frôler l'overdose, on trouve toujours pire, jusqu'au moment où un type se fait couper les deux mains par un ascenseur. Les moignons resteront accrochés aux poignets du héros.


Les effets spéciaux sont aussi géniaux, à la hauteur de la perception du futur en 1990. Bonjour les minitels, déjà dépassés quelques années plus tard, les claviers à grosses touches beiges. Et pour mourir sur Mars, par manque d'oxygène, les personnages gonflent jusqu'à exploser, dans d'atroces souffrances évidemment, avec de jolis plans sur des yeux sortis de leurs orbites. Et là, attention, génie. Totall recall comporte le plus beau montage parallèle de l'histoire du cinéma. Je l'aurais bien ajouté à ma collection de plans à ne pas oublier, mais ce montage dure facilement vingt minutes, ça pèserait trop lourd dans ma bibliothèque. Le séquencier doit se présenter ainsi:

- Les héros sont éjectés sur Mars. C'est le début de la fin, ils gonflent comme des ballons.
- Le super-réacteur de Mars va s'enclencher.
- Les héros souffrent, se tordent dans tous les sens, il n'y a pas d'oxygène, ils gonflent comme des ballons.
- Le super-réacteur de Mars va bientôt s'enclencher.
- Les yeux jaillissent des orbites, les héros gonflent, ils ont mal.
- Le super-réacteur de Mars s'enclenche.
- Aaaaaah, souffrances, corps déformés, ballons.
- L'oxygène crée d'immenses geysers sur Mars.
- Aaaaarg, je gonfle - moment d'identification du spectateur au héros dans sa douleur.
- Geyser. Geyser.
- Aaarg, il n'éclate pas encore, ce héros élastique??
- Geyser.
- Souuuffrance. Les yeux auraient du depuis longtemps pendre totalement hors des orbites.
- Une vitre éclate en ville, laissant entrer l'atmosphère mortelle de Mars.
- Ca gonfle toujours.
- Paf! Paf! cling, cling, clong, les vitres éclatent.
- Schwarzie est au paroxysme de sa souffrance, la caméra est fascinée par son visage qu'on ne reconnaît plus.
- Les gens s'approchent des vitres qui ont éclatées.
- Les héros ont atteint, très certainement, un point de non-retour dans leur déformation.
- La ville respire l'air enfin oxygéné de Mars!
- Les héros reprennent une forme humaine. Ils sont sauvé, Mars est sauvée, le monde est heureux.

Je crois qu'il y a un méchant dans l'affaire qui se tord de douleur trente secondes de plus, à peine, mais lui, il meurt.


Cette scène est une petite merveille de montage. Je veux la ressortir un jour dans ma carrière professionnelle.


Total recall
de Paul Verhoeven
avec: Arnold Schwarzenegger, Rachel Ticotin, Sharon Stone,...
sortie française: 1990

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