Nemo Nobody fête son anniversaire. Il a 119 ans et est le dernier homme sur Terre dont les cellules n'ont jamais été régénérées; il sera le dernier à mourir de vieillesse. Avant cela, son médecin tente de percer ses souvenirs; Nemo Nobody a disparu des registres à l'âge de 34 ans. Le médecin, et un journaliste, qui s'insinue dans l'hôpital, à la recherche d'un exceptionnel scoop, lui font remonter le temps et raconter ses souvenirs. Mais la mémoire de Nemo Nobody est pleine de vies différentes, en fonction des choix qu'il aurait pu faire à des moments clés de sa vie. Les histoires qu'il raconte, entremêlent divers âges et divers choix de vie...
Les principaux choix de Nemo tournent autour de l'amour. D'abord celui porté à ses parents, qui lui demandent à leur divorce de choisir entre eux deux, et ensuite celui porté à trois petites filles, auprès desquelles il s'imagine grandir, se marier, vivre et vieillir. L'idée sur les différents choix qui s'offrent à nous pourrait être intéressante. Mais le réalisateur et son approche uniquement romantique du sujet gâchent la pertinence du film. Les choix de vie de Nemo ne se concentrent que sur les différentes femmes qu'il épouse, tandis que tout le reste est toujours plus ou moins semblable. Les seules alternatives de Nemo concernent-elles uniquement sa sexualité? C'est réduire nos choix de vie à bien peu de choses, que de les concentrer seulement sur nos affections. Même si celles-ci jouent un rôle majeur dans les options que l'on croise sur nos chemins, d'autres facteurs entrent certainement en jeu.
Le sujet oscille entre une philosophie mal définie et une absurdité qui aurait pu être plaisante s'il elle avait été poussée jusqu'à la limite de l'incompréhensible. Mais le réalisateur refuse de se laisser emporter, et malgré l'entrecroisement de différentes alternatives d'une seule vie, reste extrêmement didactique. Les voix off viennent expliquer avec une logique implacable toutes les décisions prises par l'enfant, l'adulte, et le vieillard qu'est Nemo. Pas assez de fantaisie donc, et même les scènes qui s'ancrent dans une vision hallucinatoire d'un monde pré-natal manquent de légèreté. Et, malgré l'infinité de choix qui semblent s'offrir à chaque existence, Nemo, dans toutes ses vies, revient toujours vers Anna, comme si un certain destin intervenait pour recentrer ses options sur une seule ligne, droite.
Le montage appuie le côté linéaire et très scolaire du film. Un an a été nécessaire pour terminer la post-production, et le réalisateur a tenu a faire assister ses deux monteurs principaux d'une équipe de "juniors" chargés de proposer d'autres assemblages de séquences, dans le but d'observer le maximum de possibilités. Le film, monté ainsi, ne réussit pas à soumettre le spectateur aux méandres de l'esprit de Nemo. Au contraire, il manque d'originalité, se servant à outrance des retours auprès de Nemo à 119 ans, répondant aux questions du médecin ou du journaliste qui fouillent son esprit. Les relances de ces deux personnages très secondaires sont une facilité primitive pour passer d'un mariage de Nemo à l'autre.
L'image du futur n'est elle pas du tout soulignée, et c'est à peine qu'on prête attention aux cochons devenus animaux de compagnie ou aux écrans géants qui ornent les métros. C'est une énorme déception que ce Mr. Nobody qui pêche par sa rigueur et par trop de sang-froid.
Mr. Nobody
de Jaco Van Dormeal
avec Jared Leto, Sarah Polley, Diane Kruger,...
sortie française: 13 janvier 2009
Conseil de lecture: l'excellent L'homme-dé (The Dice man), de Luke Rhinehart, l'histoire d'un psychiatre new-yorkais qui décide de régir sa vie par le hasard, refuse de faire des choix et laisse son existence se jouer sur des coups de dé.
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