Tuesday, July 26, 2011

Submarine, de Richard Ayoade

Oliver Tate, 15 ans, vit son chemin anti-social comme une réelle volonté; peu importe qu'il ne soit pas beau, à la mode, terriblement populaire, il assume sa part d'étrangeté et en fait un atout. Il lui faut cependant rentrer dans un certain cadre pour approcher la jolie et tout aussi bizarroïde Jordana, qui fait de l'éczéma mais avec qui il aimerait bien perdre son pucelage. A la maison, c'est un grand bonheur pour ses parents de voir qu'Oliver a une petite amie; malgré qu'ils soient également dans leur monde, les parents d'Oliver sont soulagés de voir leur fils se comporter "normalement". Ils vivent de leur côté leurs propres révolutions; un ancien petit ami de la mère d'Oliver, un mystique en pantalon de cuir, s'installe en face de chez eux. Et tandis qu'Oliver suspecte sa mère de tromper son père et de détruire la famille, le père d'Oliver ne quitte pas sa robe de chambre et déprime.


Submarine est un film à portée iniatique, évidemment, qui met en scène un adolescent à la découverte de lui-même. Alors l'idée est plutôt sympathique, de suivre un adolescent atypique, et pourtant atteint des mêmes syndromes que tous ses camarades de classe: il faut plaire, être populaire sans avoir les atouts au départ pour cela, trouver une petite amie, éventuellement réussir son dépucelage, et gérer des parents évidemment hors-course. Oliver possède ce charme agaçant du garçon pas très beau mais suffisamment sûr de lui, en permanence en auto-analyse, introverti désespérément en besoin d'amour et de reconnaissance. Avec sa bouille ronde et sa coupe de cheveux Beatles, son duffle-coat désuet, il place à lui seul le film dans des années 60 un peu intemporelles mais terriblement présentes. 


A partir de là malheureusement, les clichés s'accumulent. De Gainsbourg aux tenues d'écoliers, des regards en-dessous appuyés aux bizarreries toujours plus étranges d'Oliver comme de son voisin, le film n'est qu'une longue série de "détails" qui pèsent lourd. Aucune de ces idées n'est réellement mauvaise, mais simplement ennuie, par peu d'originalité. Côté ambiance sixties, ou freak introverti, on a déjà des références mieux réussies (je pense, pour l'ambiance, à Une éducation, de Lone Scherfig, qui a su bien retranscrire et sans cliché toute une époque, Nowhere Boy également, de Sam Tayl-Wood; et pour le personnage "en marge", la liste est longue, de Donnie Darko à Elephant, en passant même par The Virgin suicides, voire Superbad...), et Submarine n'apporte rien de vraiment neuf ni de différent.


Les idées que Richard Ayoade suit possèdent toutes une base correcte, mais il semble se contenter de les avoir sans les développer, se satisfait rapidement de cet élément sans réellement le mettre en valeur. Ainsi Oliver regarde de loin le monde se dérouler autour de lui, à la manière d'un réalisateur omniscient qui poserait sa caméra où bon lui semble pour mettre en scène sa version des faits. Le voix off décrit alors précisément ces visions de sa propre vie, mise en scène par l'intermédiaire d'une caméra; mise en abyme faiblarde et qui, au final, correspond peu à ce personnage qui n'a pas extrêmement l'air féru de cinématographie. C'est probablement plutôt une idée de réalisateur ravi de mettre un peu de lui-même dans un personnage atypique et de se retrouver de cette manière à l'écran... Idem pour les séquences "Super 8", étrange hommage graphiquement réussi, mais pas en accord avec notre anti-héros; ces vidéos-clips longuets sont de plus redondants, signe d'un petit plaisir égoïste de réalisateur qui n'offre rien d'exceptionnel à son spectateur.



Sally Hawkins sauve quelques scènes, jolie mère avec de vrais soucis d'intégrité, là où son fils s'égare, courant de sa propre vie, en pleine émancipation, à celle de ses parents - le cocon familial rassurant. Belle dans sa jeunesse, encore touchante malgré ses habits sombres et ses jupons tristes, elle maîtrise au mieux l'art de rire, un peu engoncée dans ses cols serrés, puis de reprendre son masque de respectabilité. Elle incarne facilement ce message que Richard Ayoade, maladroitement, fait passer: sous nos apparences et dans nos petites cases, on suit le chemin que l'on a choisi. Si Oliver hésite entre aller de l'avant et rester dans sa bulle, Jil Tate a depuis longtemps fait son choix entre son mari et son ex petit-ami.


Submarine, avec son joli pitch vintage, ne tient pas réellement ses promesses, se contente d'une esthétique et d'un message vus et revus et pas traités différemment. Il ne suffit pas de trouver un personnage un peu étrange et d'ajouter quelques filtres façon pellicule usée pour être réellement décalé; somme toute, toutes ces "bizarreries" des personnages et de contexte restent très conventionnelles.


Submarine
de Richard Ayoade
avec Craig Roberts, Yasmin Paige, Sally Hawkins,...
sortie française: 20 juillet 2011

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