Monday, May 14, 2012

W.E., de Madonna

A l'occasion de la vente aux enchères des objets personnels de Wallis et Edouard, Wally Winthrop se perd dans les souvenirs d'une femme avec qui elle se trouve des ressemblances, plusieurs générations plus tard. Alors qu'elle couve du regard un porte-cigarettes, une tasse de thé,... les objets prennent vie et racontent la vie de Wallis qui, de Shanghai à Boulogne, conquit le cœur d'au moins trois hommes, dont le dernier, Edouard, fut brièvement roi d'Angleterre avant d'abdiquer de son trône par amour pour elle.


Ce deuxième film de Madonna ne tombe pas dans des travers qu'on aurait pu guetter, de manière très sarcastique. Il est loin de la comédie musicale et la musique, si elle est présente, et même un peu trop, reste dans le thème. Elle est ancrée dans le passé, les années 30 et la jeunesse de Wallis, plutôt que de se situer à la suite de la discographie de Madonna. On n'entendra cette dernière qu'au générique de fin, et là encore, elle sait rester sobre et attachée avant tout à son scénario.


Il est écrit ici et là que la réalisatrice portait depuis longtemps en elle le désir de faire vivre ces personnages. Ce n'est qu'après des recherches intensives sur Wallis, qui fit abdiquer un roi, sur l'époque durant laquelle elle vécut, que Madonna s'autorisa à réaliser son film. Je ne mettrai pas en doute cet investissement de sa part. Les détails que touche du doigt Wally Winthrop sont certainement d'époque, et les décors sont pour certains ceux-là même où ont séjourné le duc et la duchesse de Windsor. L'attention portée aux costumes est lui aussi remarquable, et rien que pour ce défilé de robes, de peignoirs, et de coiffures crantées, si tant est que vous soyez un peu séduits par cette époque, le film vaut le détour.


Mais on ne passe pas aussi facilement au scénario et derrière la caméra, et Madonna, partagée entre passé réel et présent fictif, ne réussit pas à mener son histoire de bout en bout. Ce n'est pas vraiment l'histoire de Wallis et d'Edouard qu'elle souhaite raconter. Celle-ci s'écoute dans les documentaires télévisés que se passe en boucle Wally Winthrop: quelques faits notoires, des personnages célèbres s'y croisent. Quelques anecdotes et pas mal de voix off font l'affaire. On oublie d'ailleurs le contexte historique, malgré des rappels que tout le monde reconnaît. Wallis et Edouard ne font cependant vivre que de très loin les difficultés du Royaume d'Angleterre, puis la Seconde Guerre Mondiale. Ils sont plongés en plein dans l'Histoire sans qu'on ne les voit sortir de leur chambre. Malgré la force de caractère de Wallis, on survole des évènements mieux évoqués ailleurs.


C'est la Wally d'aujourd'hui qui aurait mérité un meilleur traitement. Son histoire est plus sensible, plus réelle, et moins dans le conte de fée. Wally s'imagine des points communs avec une duchesse, et puis la force de supporter son existence de femme délaissée dans le chemin d'une femme qu'elle juge plus forte qu'elle. Son temps est à peu près égal à l'écran à celui de Wallis; mais on connaît les grandes lignes de l'histoire de Wallis, alors qu'on a tout à apprendre de Wally. Si Madonna avait voulu faire un film historique, elle serait restée uniquement avec la duchesse; en ajoutant Wally, par petites touches, elle ajoute un ingrédient qui prend le dessus, et dont on devient gourmand. Finalement, peu nous importe Wallis, dont le destin est bouclé. Wally, elle, a encore beaucoup à vivre.


L'écran aurait pu se partager entre ces deux femmes. Madonna choisit de superposer le passé de l'une avec le futur de l'autre, par de courtes séquences qui s'enchaînent en fondus trop nombreux. On n'a pas le temps de s'attacher à Wally, et Wallis nous agace par sa trop grande présence inutile. Sautant d'une séquence à l'autre, on ne reste jamais plus de dix minutes avec l'une ou l'autre.


Le scénario est donc bien géré, même s'il privilégie a priori Wallis plutôt que Wally, et la réalisation dose mal ces deux destins, enchevêtrés inutilement.


W.E.
de Madonna
avec: Abbie Cornish, Andrea Riseborough, James d'Arcy,...
sortie française: 09 mai 2012

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