Wednesday, August 29, 2012

Broken, de Rufus Norris

Skunk, tout juste sortie de l'enfance, vit dans une petite ville anglaise avec son grand frère et son père. Depuis que sa mère est morte, elle et Jed sont gardés par Kasia alors que leur père est toute la journée pris par son travail d'avocat. Archie Cunningham est cependant présent et aimant, attentif à ses enfants.En cette fin d'été, Skunk et Jed ont bâti leur repaire dans une vieille caravane abandonnée. Sur la petite place où se trouve leur maison, le voisinage impacte sur leur fin de vacances.


La construction du scénario sur le papier est classique, mêlant les destins pour rapprocher des personnages au départ pas si proches, et influer sur une jeune héroïne qui en sort grandie/vieillie. Les vies qui s'entremêlent sont cependant originales, marquées par la mort et la maladie: il y a Rick Buckley, attardé mental léger bien sage, avec qui Skunk aime discuter. Accusé de viol par l'une des trois filles Oswald, encore enfants mais déjà sexuellement matures, il est frappé par le père de la jeune fille, incapable d'exprimer autrement que par la violence ses émotions depuis la mort de sa femme. Il élève donc seul ses trois filles en leur accordant tout l'amour possible. L'accusation s'avère évidemment fausse, mais Rick a subi un choc qui aggrave sa santé mentale déjà fragile. Ses parents, eux, tentent de le garder sur les rails. Chez Skunk, Kasia et son petit ami Mike se disputent autant que des vrais parents. Mike refuse de s'engager et son départ est comme la perte d'un père pour Skunk.


Ces évènements ne semblent pas forcément liés. Entraînant des réactions en chaîne, ils provoquent néanmoins la perte de l'innocence enfantine de Skunk, confrontée au sexe, à la maladie, à la mort. A mon goût, le désastre tourne trop à la catastrophe. Le scénariste - d'après l’œuvre de Daniel Clay, je ne sais donc si je ne devrais pas reporter la faute sur le romancier -, animé de pulsions meurtrières et avec un certain goût pour le malheur, en fait trop et établit entre son action et le spectateur une distance. On n'y croit plus, à force de s'attendre à pire à chaque séquence.



Heureusement, la mise en scène "indé" - pour autant que cela signifie quelque chose - met de la légèreté dans le propos. Le réalisateur remet de la fiction dans la réalité sociale. C'est un montage parfois clipé - d'ailleurs, la bande-son est merveilleuse et joliment pop - qui intercale des images surréalistes - l'action répétitive et assourdissante d'une déchetterie à métaux, la poésie d'un terrain vague - dans ce contexte trop dur. Et la jeune Skunk, personnage de dessin animé avec toujours ses shorts en jean et son tshirt rouge, coupe au carré, air renfrogné ou sourire grandiose, Eloïse Laurence fait des miracles.


C'est ce qui rend le film supportable, et l'accumulation des désastres, dans les yeux de Skunk, n'est jamais risible. Jolie réalisation, beaux acteurs, il ne manque qu'un peu de poésie dans le propos pour rendre cohérent le travail de Rufus Norris.


Broken
de Rufus Norris
avec: Eloïse Laurence, Cilian Murphy, Tim Roth,...
sortie française: 22 août 2012

No comments: