Ce documentaire sur Serge Gainsbourg s'écrit de la même manière qu'une autobiographie. Il ne retrace pas sa vie chronologiquement, mais laisse s'exprimer le chanteur à la première personne, comme si lui-même prenait en main la narration pour se raconter. Il évoque donc en particulier son rapport à son père, ses pensées, ses désirs, ses envies, son appréciation de lui-même et de son succès... Le sujet de ses origines slaves reviennent, entremêlés d'images d'archives, d'interviews, de concert et de quelques créations qui parlent de sa Russie.
Je suis venu vous dire a le grand mérite d'aborder un sujet très basique, celui de l’œuvre d'une vie, que tout le monde connaît, pour avoir au moins fredonné Melody Neslon, eu vent de la chanson Je t'aime, moi non plus, vu ces images de Gainsbourg brûlant un billet sur un plateau de télévision, saisi son parfum de scandale et de revendications. Pierre-Henry Salfati est allé dénicher des images, celles connues, celles inédites; des enregistrements audio, et a tout rassemblé sur une timeline parfois foutraque, mais aussi jolie qu'une poésie. Les mots traînants et percutants de Serge Gainsbourg ne disent pas toujours la vérité, ou alors, le choix de ses phrases l'enjolive. Mais l'artiste lui-même aurait pu choisir de se dévoiler ainsi, en mêlant le vrai et le faux, en évoquant, au gré de ses fantaisies, les sujets qui lui tiennent à cœur, comme dans une vraie conversation où les mots roulent sans qu'on ait besoin de les relancer.
Pour se remettre dans son ambiance enfumée, Je suis venu vous dire est un film parfait, qui plonge 90 minutes durant dans un entretien quasiment intime avec Serge Gainsbourg. Son discours sur l'enfance, ses phrases ressassées comme des souvenirs cuisants mais tendres, de leçons de piano d'avec son père, son incessant retour sur ses origines, slaves, de Russie, d'une mère belle, ne nous renseignent pas forcément très exactement sur le chemin qu'il a parcouru, mais sont de délicieux morceaux choisis.
On regrette l'illustration par images d'archives trop faible, qui oblige le réalisateur à inventer des images russes, mettant soudain en scène d'autres personnages, qu'on ne reconnaît pas. C'est peut-être le passage obligé pour éviter les clichés photographiques qui auraient pu servir à combler l'image, et qui m'auraient alors sans doute interpellées par leur immobilité désastreuse - on n'a pas besoin de cela au cinéma. Cependant, si on ferme les yeux dans ces moments là, pour se laisser bercer par la voix de Serge Gainsbourg, presque murmurée, à peine audible parfois, et qu'on les rouvre pour le découvrir à tous les âges, avec sa "gueule" qu'il déteste et dont il joue.
Il faut se laisser emporter, et oublier certaines incohérences de temps, accepter des redites comme les thèmes qui lui tiennent à cœur, abandonner l'idée de l'objectivité.
Je suis venu vous dire
de Pierre-Henry Salfati
avec: Serge Gainsbourg, Katerina Fedchenko, Emilie de Pressac,...
sortie française: 15 février 2012
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