Monday, February 6, 2012

A bittersweet life, de Jee-woon Kim

Kim Sun-woo est le bras droit, ultra loyal, d'un chef de gang dissimulant ses activités mafieuses derrière la façade de son hôtel luxueux. Ce chef, Kang, le tient en haute estime, si bien qu'à lui seul il confie la surveillance de sa jeune petite amie, alors qu'il part 3 jours en voyage et même si la tension avec une famille rivale est grande à ce moment précis. Kim Sun-woo est d'abord surpris, et agacé, par ce job qu'il prend tout de même au sérieux; il est chargé par Kang de supprimer la jolie Heesoo et un éventuel, s'il existe, amant. Cette mission, a priori simple, met à mal la fidélité de Kim Sun-woo ainsi que son masque d'impassibilité et sa vie solitaire dévouée à Kang.


Vous vous souvenez de The Murderer, de Na Hong-jin? Voilà un film d'un compatriote sud-coréen dans la même veine, d'habitudes qui tournent au cauchemar, de malentendus, d'hommes qui s'emballent et de courses-poursuites et de bains de sang. Il semblerait que les Sud-Coréens (Chan-woon Park, pour ne citer que lui) gèrent ces ambiances mélancoliques et d'une incroyable violence en même temps avec une dextérité particulière. Je me réveille évidemment un peu tard pour découvrir Jee-woon Kim, après Le bon, la brute et le cinglé, et J'ai rencontré le diable. A bittersweet life était dans ma liste de films à voir depuis 2005 et sa sélection au Festival de Cannes.


On baigne rapidement dans la tranquillité avec ce film qui suit pas à pas Kim Sun-woo. La caméra reste uniquement avec lui, à décrypter son indéchiffrable visage, et montre son ambition, une dose de fierté, sa solitude. On a droit à tout son quotidien, du matin fatigué aux soirées d'insomnies. Soudain, quelques plans sur des morceaux de chair, celle de Heesoo suffisent à faire saisir une attraction. Mais Kim Sun-woo reste impassible... A moins que? Un seul moment est dissimulé au public, un moment pourtant public, alors que Heesoo travaille son violoncelle avec son orchestre, et que Kim Sun-woo, depuis la cabine d'enregistrement, la regarde. Le visage et les émotions du jeune homme seront dévoilées plus tard, en fin de film.


Ce point de rupture dans la narration du film, qui est le point de départ d'une réaction en chaîne de violence a l'esthétique toute asiatique. On n'a pas peur du sang ni des craquement d'os. Mais chaque coup de marteau est surprenant, jamais gratuit, toujours justifié par cette haine entre les familles. Au-delà d'une réalisation impeccable, c'est un véritable conte de fée qui mène le scénario. Il réveille mon côté fille, qui aime les belles histoires d'amour mais préfère aussi les bains de sang à la mièvrerie d'une comédie sentimentale. Car oui, j'ose le dire, A bittersweet life est avant tout une histoire d'une sensiblerie extrême. Le personnage principal motive sa vengeance par un amour même pas consommé, par juste l'idée de cet amour qui remet en question toute sa vie et sa confiance aveugle en son chef de gang. Il se découvre soudain l'instinct de protection, celui de Prince Charmant capable d'un noble geste pour sa dulcinée, et même s'il sait qu'il va lui en coûter sa vie.


Sa vengeance est ensuite aussi théâtrale et mise en scène que celle du Comte de Monte-Cristo de Dumas. Implacable, et inébranlable, elle détruit un par un tous ceux qui ont participé, de près ou de loin, à sa déchéance. Kim Sun-woo, aussi chevaleresque que dans un vieux conte, ne recule jamais, se relève toujours, et tout ça pour un regard échangé.


Si, comme moi, vous l'aviez oublié depuis 2005, A bittersweet life est à ressortir du fond des tiroirs!


A bittersweet life 
de Jee-woon Kim
avec: Lee Byung-Hun, Kim Young-Cheol, Shin Min-a,...
sortie française: mai 2006

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