Friday, June 12, 2015

Tale of tales, de Matteo Garrone

Une reine désirait à tout prix un enfant et il lui était donné, accompagné d'un nuage mortel ; un roi se sentait seul et apprivoisait une puce, l'aimant comme sa propre enfant, qu'il négligeait par ailleurs ; un roi se laissait porter par ses désirs et tombait amoureux d'une voix.


Il était une fois... non, attends, il était TROIS fois, trois royaumes, trois monstres, autant de contes et encore plus de fous. De la cinquantaine d'histoires comprises dans l’œuvre de Giambattista Basile, Matteo Garrone n'en a retenu que trois, et c'est déjà trop long. Il réussit cependant à créer un univers merveilleux, où le grotesque rejoint le beau, où le quotidien rencontre l'extraordinaire, où l'on se trouve sans cesse à la frontière, du fantastique, de la folie, de l'érotisme. Les décors réunissent les paysages les plus extrêmes, du précipice au fond du lac, sublimés par le vide ; chaque château est planté au milieu d'un désert, ou d'une forêt, et les rares hommes qui peuplent les décors sont des bouffons, des saltimbanques, des sorcières, des ogres, des rois, des princesses.


Les trois contes se rencontrent peu, chacun restant dans son royaume, isolé au milieu de nulle part. Les trois histoires sont donc contées séparément, et les coupures se font, semble-t-il, sans raison, sans point culminant qui nous tiendrait en haleine. Les excursions en dehors du château font espérer des rencontres entres les histoires, mais sans cesse on est déçu : les clashs ne se produisent pas, l'intensité qui monte retombe comme un soufflé. Entre tout ça, des scènes trop longues qui font profiter du paysage.


Dès les premières images du film, on peut présager de ces promesses non tenues. L'ouverture se fait sur les pieds déchaussés d'un bouffon, qui marche lentement sur un sol chauffé par le soleil. Il rencontre d'autres saltimbanques, mais on ne verra jamais son visage et on passe subitement à la carriole d'une petite famille qui se prépare à donner une représentation. Le personnage aux pieds nus disparait. La petite famille n'a pas d'autre intérêt que de nous peindre encore un cliché de ce royaume. On nous rejoue le même scénario à la fin du film, où se tisse la toile de la suite des aventures de nos trois royaumes, alors qu'on aimerait déjà bien conclure ce qui s'est raconté durant le film.


Quitte à jouer la carte du conte, j'aurais accepté facilement une morale, un point final. Ce n'est pas le conte des contes, mais simplement DES contes ; manquant de liens, et d'unité, éparpillé, le film ne porte pas franchement le flambeau du merveilleux.



Tale of tales
de Matteo Garrone
avec : Salma Hayek, Vincent Cassel, Toby Jones,...
sortie le : 1er juillet 2015

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