Javier, enfant, voit son père mourir, engagé de force dans la guerre civile espagnole. L'image qu'on retient de lui est celle du clown Auguste, en costume de scène, terrifiant et destructeur, armé d'une manchette et d'un nez rouge, sur le terrain de bataille. Javier grandit, et suit la tradition familiale en devenant clown; mais, antithèse de l'Auguste, il endosse le costume de clown triste. Il fait équipe avec Sergio, Auguste de génie mais homme violent en dehors du chapiteau. Il frappe sa petite amie, Natalia, qui, dans des accès de masochisme, retourne auprès de lui, non sans flirter avec Javier, par envie de sécurité et de douceur autant que par provocation. Javier et Sergio, au fil des ans, se battent et se défigurent, dans une scabreuse reconstitution de leur numéro scénique, pour Natalia, sur fond de dictature franciste.
Le drame sentimental, qui s'appuie sur deux lignes régissant la plupart des films romantiques, est traité sans mièvrerie, au contraire. Deux hommes se déchirent pour une même femme, mais la violence, l'auto-destruction et la folie sont les maîtres-mots de ce scénario. Pour réussir son pari de raconter l'amour, la passion, et leurs tragédies les plus extrêmes, Alex de la Iglesia met tout de son côté, et avant tout une image à l'esthétique marquée. Les couleurs sont désaturées, les décors parfois effacés dans l'ombre, et la dramaturgie du cadre intensifiée. Le cirque lui-même n'est pas vraiment montré, au profit des personnages, costumés, grimés sur scène comme dans la vie. Le contexte du chapiteau n'est là que pour mieux mettre en valeur des caractères d'artistes dérangés, et dont les gonds ne restent en place que parce qu'ils ont la scène; hors du cirques, Sergio, Javier, Natalia continuent à se déguiser, cachant leurs aspérités par le travestissement. Cette absence totale de décor - sauf dans la dernière séquence, qui tire parti d'un monument symbolique et immense - est un réel parti pris graphique extrêmement fort visuellement; mais qui possède aussi la qualité de conserver les personnages à l'avant-plan.
On se concentre donc sur de superbes caractères, définis par une enfance - celle de Javier, tristement sauvage - et par un contexte également politique. La guerre marque les esprits, Franco au pouvoir donne le ton d'une rue contrôlée et pourtant anarchiste dans notre petit groupe de fous furieux. Cependant, malgré ce très très joli départ, j'ai décroché de nombreuses fois du film, la faute à un scénario qui semble avoir été sauvagement coupé de quelques scènes indispensables pour construire les liens d'une scène à l'autre. L'histoire effectue parfois de grands sauts temporels; ou alors, nos héros déduisent on ne sait comment des évènements qui les conduisent plus loin; on avance correctement, mais sur un sol parfaitement instable. De la brillante ouverture du film, on perd de plus en plus pied, jusqu'à terminer un peu étonné de tant de bonne volonté sabotée au fur et à mesure.
Quelqu'un peut-il m'expliquer, entre autres, cette petite séquence dans laquelle Javier se fait poursuivre à coups de pieds par des enfants et hurle en découvrant, dans un bar, son visage, alors qu'il n'a même pas encore été capturé?? (l'honneur est sauf, je ne dévoile rien de l'histoire, mais ceux qui l'ont vue devraient comprendre...) Et quel est ce raccourci étrange qui mène tous les protagonistes à leur destination finale comme si elle était évidente: "une église? un sous-sol? mais c'est bien sûr! Un seul lieu réunit ces particularités"...
Malgré donc l'image sublime, et une tentative de scénario axé sur des personnages forts, Balada triste manque son coup, par faute de tenir son pari jusqu'au bout sur tous les plans.
On se concentre donc sur de superbes caractères, définis par une enfance - celle de Javier, tristement sauvage - et par un contexte également politique. La guerre marque les esprits, Franco au pouvoir donne le ton d'une rue contrôlée et pourtant anarchiste dans notre petit groupe de fous furieux. Cependant, malgré ce très très joli départ, j'ai décroché de nombreuses fois du film, la faute à un scénario qui semble avoir été sauvagement coupé de quelques scènes indispensables pour construire les liens d'une scène à l'autre. L'histoire effectue parfois de grands sauts temporels; ou alors, nos héros déduisent on ne sait comment des évènements qui les conduisent plus loin; on avance correctement, mais sur un sol parfaitement instable. De la brillante ouverture du film, on perd de plus en plus pied, jusqu'à terminer un peu étonné de tant de bonne volonté sabotée au fur et à mesure.
Quelqu'un peut-il m'expliquer, entre autres, cette petite séquence dans laquelle Javier se fait poursuivre à coups de pieds par des enfants et hurle en découvrant, dans un bar, son visage, alors qu'il n'a même pas encore été capturé?? (l'honneur est sauf, je ne dévoile rien de l'histoire, mais ceux qui l'ont vue devraient comprendre...) Et quel est ce raccourci étrange qui mène tous les protagonistes à leur destination finale comme si elle était évidente: "une église? un sous-sol? mais c'est bien sûr! Un seul lieu réunit ces particularités"...
Malgré donc l'image sublime, et une tentative de scénario axé sur des personnages forts, Balada triste manque son coup, par faute de tenir son pari jusqu'au bout sur tous les plans.
Balada triste
d'Alex de la Iglesia
avec: Carlos Areces, Antonio de la Torre, Carolina Bang,...
sortie française: 22 juin 2011
2 comments:
c'est pas Javier qui se regarde dans le bar mais Sergio car il s'est fait péter la tronche par Javier justement.
Quant à la destination finale, il me semble que c'est le lieu où le père de Javier est mort alors que ce monument était en cours de construction par les prisonnier politiques.
Ah bah merci Anonymous; je ne me suis pourtant pas du tout endormie, mais j'ai raté de gros passages... erreur de mon cerveau ou faute de scénar? A vous de voir...
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